Alors que tous les regards sont braqués sur Euroméditerranée pour le développement de l’immobilier de bureaux à Marseille, le quartier de la Valentine abrite une réserve foncière qui pourrait bien venir concurrencer le centre-ville. Au cœur de la vallée de l’Huveaune et à la limite du parc national des Calanques, le Domaine Vallée Verte peut s’étendre sur 40 hectares dont seul un tiers est aujourd’hui aménagé pour accueillir les entreprises. Malgré le potentiel extraordinaire de cette zone, le propriétaire, Yvan Gouchon, se veut prudent sur la communication de ses projets. Un lourd passif économique pèse sur ce site et il souhaite l’effacer avant de sonner les clairons.
Transformer un site industriel en parc d’activités écologique
Imaginés par les architectes du « Nouveau Marseille », René Egger et Fernand Pouillon, les bâtiments ont été construits pour accueillir l’usine de Nestlé en 1949. Cette histoire industrielle a pris fin en 2004 avec la fermeture du site malgré une lutte féroce mais vaine des salariés pour conserver l’activité. Le promoteur australien Goodman a tenté ensuite de développer cette zone en attirant de nouvelles entreprises. Il ambitionnait en 2011 la création de 60 000 m² de bureaux en plus des 25 000 m² existants mais a finalement dû passer la main. L’ensemble sera alors repris en 2013 par YG Investissement, la société de Yvan Gouchon basée à Beaulieu qui s’est associé avec la Caisse d’épargne Provence Alpes Corse pour boucler le financement de l’opération. Depuis, le nouveau propriétaire a patiemment élaboré sa stratégie marketing pour transformer cet ancien site industriel en parc d’affaires résolument tourné vers le développement durable.
Alors, coup de com’ ou véritable révolution écologique ? Le site a été renommé Valentine Vallée Verte, avant de devenir Domaine Vallée Verte l’an dernier, pour symboliser ses ambitions. Pour marquer sa différence, Yvan Gouchon s’est rapproché de spécialistes de l’environnement comme Veolia pour, par exemple, imaginer un nouveau système de traitement des déchets permettant de recycler 75 % des poubelles du site. Il a également installé 6 000 m² de panneaux photovoltaïques sur les toits des bâtiments pour une puissance de 3 MW. Un projet de boucle thermique est aussi en cours d’élaboration avec EDF pour alimenter l’ensemble du parc en chaud et froid en collaboration avec les industries voisines. Elle permettrait de réaliser de 25% à 30% d’économie d’énergie. « La notion environnementale est inscrite dans les statuts du domaine. Elle fait partie intégrante de notre identité », insiste Yvan Gouchon.
Un lieu où il fait bon travailler
Cet entrepreneur azuréen rêve de faire du lieu un parc d’entreprises « à la californienne » avec de la verdure et des services au top pour que les salariés soient heureux d’y travailler. Depuis son arrivée, il a investi 4,5 millions d’euros dans les nouvelles infrastructures et les services : « Nous prenons en charge 70% des charges induites pour montrer l’exemple », ajoute-t-il. Sa dernière trouvaille, un « club affaires » ouvrira au mois de juin et proposera un restaurant inter-entreprises, une crèche, une salle de sport, des salles de réunions… Ce bâtiment dédié au bien-être des travailleurs aura coûté 2,5 millions d’euros. Et il ne compte pas s’arrêter là car un nouvel espace de 700 m², baptisé « My Office Vallée Verte », verra le jour à la fin de l’année. Il accueillera une pépinières d’entreprises et des espaces de co-working pour les start-ups. « On veut attirer des groupes internationaux qui pourront essaimer et travailler sur des solutions innovantes », annonce Yvan Gouchon.
Un potentiel de plus de 5 000 emplois à terme
Pour l’instant, Domaine Vallée Verte abrite une vingtaine d’entreprises. Des grands groupes comme La Poste, la Caisse d’Epargne ou Veolia et des PME en croissance avec Novarem, Eeworx ou FDP Systems. Elle vient d’accueillir l’Établissement français du sang et compte bien en attirer d’autres à moyen terme. « Nous travaillons avec les collectivités et Provence Promotion pour rendre le site plus attractif, le faire connaître à travers le monde. La compétition est internationale mais nous proposons un environnement de travail unique dans une ville en plein boom », assure Yvan Gouchon. Sur les 40 000 m² de bureaux existants, il ne reste plus que 1 000 à 1 500 m² de disponibles, signe d’un bon départ pour la commercialisation du site. Mais il ne s’agit là que du commencement de l’aventure pour le Domaine Vallée Verte qui peut encore s’étendre sur plus 20 hectares nouveaux. Pour l’heure, un millier de salariés s’y rend chaque jour pour travailler mais ce chiffre pourrait dépasser les 5 000 à terme. Ce sont près de 60 000 m² nouveaux de bureaux qui peuvent être réaliser sur l’ensemble du domaine. « Il est trop modeste pour le dire mais Yvan Gouchon pourrait être à l’origine de la deuxième plus grande zone d’activité marseillaise après Euroméditerranée », avance Julien Ravier, élu municipal de la mairie du 12e arrondissement.
Les autorisations pour l’extension attendues avant la fin de l’année
Pour l’heure, aucun chantier n’a encore été lancé et Yvan Gouchon préfère ne pas s’étendre sur les possibles extensions : « Tant que nous n’avons pas les autorisations, je me concentre sur l’existant », répond-il prudemment. Mais du côté de la mairie et de la Soléam, le projet semble trouver grâce et les documents nécessaires au lancement de prochains travaux devraient être signés bien avant la fin de l’année. Depuis le départ, le propriétaire du Domaine et la Ville se sont mis d’accord pour faire pousser le plus de locaux d’activités sur le site avec un objectif, permettre aux PME de se développer et d’être propriétaires de leurs murs. Les futurs bureaux seront donc en grande partie proposés à la vente avec des lots très variables allant de 50 à 5 000 m². Sur les profils d’entreprises attendus, Yvan Gouchon souhaite un mix entre activités tertiaires, avec une forte tendance vers les nouvelles technologies, et logistiques. Le Domaine Vallée Verte profite d’un emplacement très avantageux avec un accès facile sur les autoroutes A 50 et A 501. Reste le problème des transports en commun encore trop rares dans cette zone de la ville.
Une zone encore démunie en transports en commun
Yvan Gouchon s’est longtemps battu avec les pouvoirs publics pour obtenir une desserte en bus pour les salariés de la zone mais ne voyant rien venir, il a a finalement opté pour un système de navettes privés. Ce sont 1 300 personnes qui utilisent ce service chaque mois pour se rendre sur le domaine : « Il faut maintenant aller voir la RTM pour leur expliquer qu’une ligne dédiée serait rentable », explique Julien Ravier. Ce dernier affirme que la Métropole travaille en priorité sur les quartiers Est de Marseille afin de désengorger les axes routiers et de rabattre le trafic sur les transports en commun. Il cite par exemple le projet de Val’Tram qui relierait Noailles à Aubagne en passant par la gare de la Barasse non loin du parc d’activités. Un pôle multimodal est également à l’étude sur un terrain derrière le cinéma des 3 Palmes. Des projets qui ne verront pas le jour avant cinq ou six ans. En attendant, la Vallée verte devra faire avec ses atouts et ses défauts pour convaincre les nouvelles entreprises d’investir.