L’entreprise Total a reçu, ce mercredi 16 mai, l’autorisation de l’État d’exploiter la bio-raffinerie de La Mède, à Châteauneuf-les-Martigues, dont l’ouverture est prévue pour l’été prochain. Cette autorisation d’exploitation fait suite à près de deux ans d’instructions de dossier par les services de l’État dans le cadre de la procédure « installation classée pour la protection de l’environnement » (ICPE). L’arrêté tient notamment compte des recommandations formulées par le commissaire enquêteur à l’issue de l’enquête publique qui s’est déroulée du 13 mars 2017 au 14 avril 2017 inclus, en mairies de Châteauneuf-les-Martigues, Martigues et Sausset-les-Pins. Deux ans de procédure, durant lesquels les ONG se sont également battues pour surveiller les impacts de la raffinerie sur l’environnement.
Au travers de ce projet de reconversion de la raffinerie, dont l’investissement s’élève à 275 M€, Total envisage de développer une production de biodiesel d’une capacité de 500 000 tonnes par an grâce au raffinage d’huiles végétales et usagées, faisant de cette bio-raffinerie l’une des plus importantes d’Europe. Le site de La Mède est d’ailleurs décrit par l’industriel comme « la première bio-raffinerie française de taille mondiale ». Autour de la production de biocarburants, Total prévoit d’exploiter un parc logistique de produits pétroliers, un centre de formation professionnelle sur les métiers du raffinage et une ferme photovoltaïque.
Nicolas Hulot : « Réduire au maximum » l’utilisation d’huile de palme
Dans un communiqué, le ministre de la Transition écologique et énergétique (qui sera d’ailleurs à Marseille ce vendredi) annonce soutenir ce projet « qui est une alternative aux carburants traditionnels d’origine fossile permettant de réduire les émissions de gaz à effet de serre et d’avancer vers la sortie des énergies fossiles. » C’est la première fois qu’il s’exprime sur cet épineux dossier. Ce matin, au micro de Jean-Jacques Bourdin (RMC), Nicolas Hulot a appelé Total à réduire « au maximum » l’utilisation d’huile de palme dans sa bio-raffinerie de La Mède, « et d’essayer d’année en année de réduire la part d’huile de palme et d’augmenter la part d’huiles usagées». Et d’ajouter : « Mais on ne peut pas avoir tout du jour au lendemain».
La création de ces biocarburants sera encadrée, puisque qu’une part importante de l’approvisionnement de la bio-raffinerie proviendra dans un premier temps d’huiles végétales brutes (palme, colza, soja). En avril, les ONG Greenpeace et les Amis de la Terre, citant un document de la préfecture des Bouches-du-Rhône, avaient affirmé que le site consommerait 550 000 tonnes d’huile de palme par an, faisant bondir de 64 % les importations françaises d’une huile dont la production en Malaisie et en Indonésie entraîne une déforestation fragilisant l’écosystème. C’est pourquoi Nicolas Hulot « a veillé à ce que l’arrêté d’autorisation prévoit bien l’obligation d’utiliser des huiles répondant aux critères de durabilité fixés par la Commission européenne, afin de s’assurer que la production des biocarburants ne se fera pas au détriment de la biodiversité et de la protection de l’environnement » indique le communiqué du ministère.
Des prescriptions pour limiter l’impact environnemental
Conformément à l’arrêté de la préfecture des Bouches-du-Rhône, Total devra se contraindre à un nombre de prescriptions sur l’ensemble de la chaîne, de la gestion au suivi d’exploitation. L’Etat a établi des mesures visant à limiter les effets et les impacts de l’exploitation de ses installations sur son environnement au travers d’un certain nombre d’obligations : à commencer par limitation à moins de 450 000 tonnes par an d’huile de palme, avec une part minimale de 25% en huiles recyclées ou usagées.
L’arrêté entend, par ailleurs, imposer à Total des dispositions particulières en cas d’épisodes de pollution atmosphérique ; définir des objectifs complémentaires de limitation et de réduction des émissions atmosphériques qui génèrent des émissions, dans l’air, de composés organiques volatils (COV) cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques (CMR), notamment de benzène, butadiène et dichloroéthane. L’Etat demande également à Total de prévenir et de réduire la production et la nocivité des déchets et d’en assurer une bonne gestion.
Total s’engage
De son côté, l’entreprise « prend l’engagement de limiter l’approvisionnement en huile de palme brute à un volume inférieur à 50 % des volumes de matières premières qui seront traités sur le site, soit au plus 300 000 tonnes par an ». Pour limiter l’utilisation de ces huiles végétales, Total affirme notamment recycler des produits issus de l’économie circulaire, comme des graisses animales « qui pourront représenter au moins 100 000 tonnes par an » écrit le groupe dans son communiqué.
L’évolution de la raffinerie de Total avec l’application des mesures imposées par l’arrêté préfectoral devrait se traduire par « une réduction significative des nuisances pour les populations et impacts environnementaux directs (réduction des émissions atmosphériques, de la consommation en eau et en énergie) ainsi qu’une réduction très sensible du risque technologique (disparition du risque toxique, réduction des aléas technologiques) », conclut le communiqué de la préfecture des Bouches-du-Rhône.
Liens utiles.
> La bioraffinerie de Total à la Mède sera-t-elle vraiment écologique ?
> Le vote contre la bioraffinerie de Total, les explications du maire Gaby Charroux