On le sait, et on peut le comprendre, le déplacement d’un chef d’Etat, d’un chef de gouvernement, mais également d’un ministre nécessite forcément l’existence d’un cadre. Le déplacement est organisé, pire, millimétré pour faire en sorte que la place laissée à l’imprévu soit la plus réduite possible. L’homme (ou la femme) est exposé(e), tous ces faits et gestes sont épiés par les journalistes, analysés et ensuite interprétés. Il y a aussi des règles strictes de sécurité. Les visites officielles, les « V.O. » comme les nomme le personnel qui gère la communication dans ce cas s’enchaînent, sur ce mode. Le jeu est ainsi.
[pullquote]Un simulacre pour tout journaliste soucieux de rapporter le contenu précis, pertinent et vérifié de cette pérégrination.[/pullquote] Seulement voilà, quand une visite franchit un cran supplémentaire et atteint donc la volonté farouche de ne pas donner à tous les médias une égalité d’accès à l’information, les choses sortent du cadre de l’acceptable. Jeudi 8 octobre, la venue de François Hollande à Marseille et au Camp des Milles d’Aix-en-Provence fut un simulacre pour tout journaliste soucieux de rapporter le contenu précis, pertinent et vérifié de ce déplacement.
Au Camp des Milles, des « pools » sont donc formés. Le pool, c’est un nombre restreint de journalistes qui (en principe) représentent les autres et mettent leur production à la disposition de ceux qui ne sont pas autorisés à accéder à tel ou tel moment, lieu d’un parcours. Un journaliste radio, un cameraman, un photographe et un rédacteur sont ainsi choisis. Ce sont souvent des journalistes du service public, AFP en tête, et… du journal local (ici propriété de Bernard Tapie). Un traitement sélectif qui entraîne une distorsion de concurrence très dommageable, en particulier dans le secteur très concurrentiel de l’information en ligne. On sait en effet que tous les médias reçus dans le pool diffusent aussi sur Internet. Les médias d’info « tout en ligne », nouveaux entrants, ne sont jamais dans ces pools.
[pullquote]Maîtriser et contrôler l’image du pouvoir en place.[/pullquote] « Non ce n’est pas prévu » confiait hier, droit dans les yeux, un membre de l’organisation de la visite à notre journaliste. Pas de pool pour les sites internet. Pas pour Gomet’, donc. Notre reporter envoyé ce jour-là sur la visite a donc passé du temps dans sa voiture, dans une salle de presse et dans la rue. Nous continuerons bien sûr à tenter de faire notre travail. Hors pool, car nous savons aussi que ce dispositif, sert avant tout à maîtriser et contrôler l’image du pouvoir en place. Fusse-t-il prétendument « normal. »