53 maires devraient former un groupe d’intérêt communal au sein de la future métropole qui comptera 240 sièges. Nous avons interrogé Georges Cristiani, maire de Mimet, président de l’union des maires des Bouches-du-Rhône qui fait partie de ce groupe. Il a été sur le devant de la scène durant ces deux dernières années avec son combat farouche contre les lois Notre et la loi Maptam qui instaurent la métropole Aix-Marseille-Provence.
Gomet’ : Comment votre groupe se positionnera-t-il à la métropole ? Serez-vous partisan ?
[pullquote]Nous ne sommes pas dans des calculs politiciens, ni dans l’intérêt partisan, mais dans de l’intérêt communal.[/pullquote] Georges Cristiani : Partisan non. En revanche un maire, il est attaché à un territoire et souvent quel que soit son parti politique, s’il en a un, cela ne le préoccupe pas beaucoup lorsqu’il faut traiter des problèmes de sécurité, de voirie ou de proximité. Il est avant tout maire d’une population et d’un territoire. Je constate qu’au plus on descend dans l’échelle territoriale, au moins on a besoin de couleur politique. Vous aurez de moins en moins de partis politiques au plus la commune sera petite. Dans la métropole, il y a 92 communes : entre celles de 5000 habitants et celle de 800 000 habitants : il y a une énorme différence d’approche des problèmes et c’est bien normal. A ce moment-là, les partis politiques peuvent être beaucoup moins présents dans une petite commune. Le maire est attaché à la proximité et donc à la territorialité des choses. Nous ne sommes pas dans des calculs politiciens, ni dans l’intérêt partisan, mais dans de l’intérêt communal. Je ne suis pas contre le principe de métropole. Mais je ne suis pas d’accord avec cette métropole. Je défends une métropole des transports, une métropole de l’emploi, une coopération économique entre les intercommunalités, comme je le proposais déjà en 2011. En revanche, je ne suis pas d’accord avec cette loi qui impose un organe supplémentaire de 240 élus à fiscalité unique.
Gomet’ : Pourquoi un tel groupe dit d’intérêt communal ?
G.C. : Aujourd’hui, nous sommes 53 maires à nous être engagés. Demain, il y en aura plus ou il y en aura moins. Mais ce qui est certain c’est que dans cette métropole il y a 92 maires attachés à leur propre intérêt communal. Je n’ai jamais rencontré un maire qui n’y soit pas attaché. On peut très bien être maire d’une petite commune et avoir une option politique, ce qui n’est pas mon cas. Mais les partis politiques ce n’est surtout pas le ciment du travail quotidien d’un maire. Si les partis politiques s’en étaient rendus compte un peu avant, on ne serait pas dans cette désaffection aujourd’hui des partis politiques. Donc nous recentrons notre force sur l’intérêt des communes et des populations qui nous ont élu.
Gomet’ : Si je suis votre logique, la métropole sera un ensemble de communes qui chercheront à y trouver leur intérêt. Marseille étant majoritaire en nombre d’élus , la métropole lui sera entièrement destinée à servir ses intérêts. Est-ce cela ?
[pullquote] Pour faire fonctionner la locomotive dans le train de 91 wagons, il va falloir mettre du charbon dans la locomotive. [/pullquote] G.C. : Marseille est, par principe, la locomotive de cette future métropole. C’est la plus grande commune par sa population. Pour faire fonctionner la locomotive dans le train de 91 wagons, il va falloir mettre du charbon dans la locomotive. Ce n’est pas un problème autre que la notion d’un train qui doit démarrer et arriver à l’heure, qui doit être là pour développer l’emploi, l’économie, protéger l’environnement et faciliter les transports. Si on demande d’augmenter les impôts des ménages et des entreprises, à ce moment-là, on ne sera pas tout à fait d’accord voire pas d’accord du tout. Ce ne sont pas des partis qui doivent diriger un territoire comme celui-là. Si on fait une métropole des partis, on s’est trompé de problème.
Gomet’ : Avez-vous peur que Marseille avale les petites communes comme Mimet ?
G.C. : C’est pour éviter cela que le groupe d’intérêt communal aura toute sa valeur et toutes ses forces. On pense que toute ville-centre quelle qu’elle soit a une force politique importante. Il faut ensuite que l’équilibre soit réalisé par rapport à l’aire métropolitaine. On ne nie pas cette aire métropolitaine. On dit juste que le gouvernement est allé beaucoup trop rapidement, a fait une loi précipitée, n’a pas pris en compte les particularités de la Provence. Je pense qu’il a fait une très grossière erreur en imposant cette métropole de la façon dont il l’a fait sans donner les moyens. Car à ce jour, il n’y a aucune dotation supplémentaire pour la métropole.
Gomet’ : Que pensez-vous de la candidature de Jean-Claude Gaudin à la présidence de la métropole ?
[pullquote]Nous allons avoir un débat interne pour savoir si nous présentons ou non un candidat à la présidence.[/pullquote] G.C. : Jean-Claude Gaudin a montré qu’il respecte les communes et leurs maires. A l’heure qu’il est, rien n’est fixé en ce qui concerne notre groupe. Nous allons avoir un débat interne pour savoir si nous présentons ou non un candidat à la présidence de la métropole. Mais pour l’instant nous n’avons pas encore pris de décision.
Gomet’ : La question de la fiscalité préoccupe également votre groupe. Vous redoutez une hausse des impôts à cause de la métropole ?
G.C. : Avec la métropole qui aura une fiscalité unique, la question est : va-t-on augmenter la charge fiscale des entreprises et des ménages ? Nous, on ne veut pas. A la suite de cela, M. Gaudin ou un autre président devra gérer 92 communes et ce n’est pas une mince affaire. Pour le moment, sans financement d’Etat, ce président quel qu’il soit devra bien se rendre compte qu’on ne peut pas le faire sans les maires. Si l’on ne remet pas les communes au centre du dispositif et des décisions, on n’y arrivera pas. La ville-centre ne pourra rien faire sans les 91 autres communes.
Gomet’ : Que pensez-vous de la conférence des maires, instance prévue par la loi Notre comme organe consultatif dans la métropole Aix-Marseille-Provence ?
G.C. : On en parlera quand nous y serons. Je pense qu’avoir créé un nouvel étage administratif et politique en France de 240 membres, c’est une folie technocratique, une hérésie territoriale. On aurait pas dû créer cette affaire de cette façon-là. Ça a été une étonnante démarche française : on a rapproché Toulouse de Montpellier. On a fusionné trois régions en une. De la même façon, ils mettent ensemble des bassins de vie différents. Cela aurait été tellement plus simple de faire de la coopération territoriale intelligente comme nous l’avions proposé. A la place de ça, ils ont préféré imposer une loi à la va-vite. C’est le choix d’un gouvernement mais je pense qu’on a tort de ne pas consacrer la proximité. Les gens d’ici n’ont pas envie de vivre dans une métropole. Ils vous diront « je suis marseillais, aixois, salonais, mimétain mais pas je suis métropolitain ».