Victor Hugo Espinosa, président d’Ecoforum, estime que les gouvernants, et en premier lieu les élus, ne sont pas informés de l’ampleur de la pollution atmosphérique et de ses conséquences. De ce fait, il en résulte un « manque d’action publique » en matière de lutte contre la pollution de l’air. Pourtant, les outils sont là pour mesurer ce phénomène. En effet, la région a mis en place Air Paca qui permet d’observer en temps réel la qualité de l’air dans la région. Le manque d’action publique qu’évoque M. Espinosa est donc dû à l’absence de prise de conscience sur l’importance de l’air que l’on respire. Élus comme citoyens ne sont donc pas assez sensibilisés sur ce sujet pourtant d’importance capitale.
Car la pollution de l’air à Marseille engendre 1000 morts directes chaque année. Dans cette ville de 800 000 habitants, 350 000 vivent dans une zone très fortement polluée. Face à ce constat accablant, Ecoforum cherche à montrer qu’améliorer la qualité de l’air est possible. Et que les 110 000 voitures qui encombrent quotidiennement le boulevard Sakakini ne sont pas une fatalité.
En matière de transports, “des mesures simples et peu coûteuses”
Un rapport de la cour régionale des comptes, paru en avril 2015, va dans le même sens et considère l’aire métropolitaine comme « un territoire polycentrique composé de plusieurs intercommunalités avec des interconnections fortes […] qui ont favorisé l’utilisation de la voiture particulière dans les déplacements quotidiens. » Le même rapport souligne que « des mesures ont été mises en œuvre pour augmenter la part des transports collectifs dans les déplacements » mais leur bilan est « mitigé. » En réponse à cela, Ecoforum souhaite montrer que des solutions existent.
Pour réduire la pollution et « éviter que les villes ne se transforment en énormes garages » Claude Julien, représentant de la Fnaut Paca (Fédération nationale des associations d’usagers des transports) préconise de développer massivement le tramway du centre urbain vers les quartiers périphériques. Car « construire 1 km de métro souterrain coute autant que construire 5 à 10 km de tramway. » Et aujourd’hui, il faut « 55 minutes en bus pour rallier le Centre Bourse depuis les quartiers Nord.» Il souhaite ainsi accompagner ce développement du tramway par la création de parkings en périphérie « de façon à mettre en place des pôles multimodaux pour que les usagers aient moins recours à la voiture. » Il plaide également pour la mise en place sur les bus d’un « signal de priorité » qui leur permettrait de redémarrer plus rapidement à chaque arrêt. Un gain de vitesse et de temps le rendrait ainsi plus attractif pour les usagers tentés par la voiture. Mais, même si celle-ci reste un moyen de transports nocif pour l’environnement, certaines initiatives permettent de modifier son usage, au point de la rendre compatible avec une lutte contre la pollution
Par exemple, Yvon Roche a fondé Citiz Provence. C’est une entreprise qui loue des voitures aux particuliers pour leurs trajets habituels. Partant du constat « qu’une voiture est utilisée seulement 15% du temps, » il a mis en place « une flotte de 70 voitures essence ou hybride, et de 20 électriques. » Ces véhicules ont tous moins de cinq ans, afin que leur empreinte carbone soit minime. Yvon Roche remarque que « les utilisateurs [du service qu’il propose] rationnalisent leur pratique de la voiture une fois abonnés » à Citiz. Ainsi, « 95% des clients n’ont pas de voiture personnelle et ils ont davantage recours aux transports en commun. »
La pollution de l’air est aussi liée à l’électricité
Contrairement à certains clichés, l’électricité n’est pas forcément une énergie propre. Dans de nombreux cas, le mode de production de l’électricité rend cette énergie très polluante. Ainsi, Jean-Luc Debard lutte contre la précarité énergétique dans le cadre de l’association Ecopolenergie. Concrètement, il aide les communes à réduire la facture énergétique des bâtiments communaux et de l’éclairage public. Cette association dispense également des formations aux économies d’énergie. Elle réduit ainsi la consommation d’électricité, dans le but de réduire également la production de cette énergie « qui peut s’avérer très polluante.»
C’est notamment le cas à Gardanne, où la municipalité porte le projet d’incinérateur à biomasse qui produirait donc de l’électricité en brûlant déchets en bois, plastiques et bois importé. Rémy Corrodano, responsable de l’association SOS Forêts Sud, évoque à cause de cet incinérateur « une très forte pollution aux particules de bois, cancérigènes et jugées très nocives par l’OMS [Organisation Mondiale de la Santé] qui mettrait directement en danger 5000 à 8000 habitants et 600 élèves de primaire.»