Après la première assemblée générale d’Africalink lundi 4 décembre, StartupBRICS et MCO Congrès lançaient la première édition d’Emerging Valley, un sommet qui a rassemblé, mercredi 6 décembre à thecamp, entrepreneurs africains et investisseurs du territoire. Un objectif : positionner Aix-Marseille comme le nouvel hub de l’innovation émergente entre l’Europe et l’Afrique.
Karangué, Klab, Jumia, Lafrica Mobile, Bifasor : ces entreprises africaines, renommées sur le continent africain, sont parfois encore inconnues ici. Ces entrepreneurs venus du Rwanda, du Burkina-Faso, du Maroc, du Sénégal ou encore du Nigéria sont venus témoigner de leur succes-stories, des marchés sur lesquels ils interviennent, de leurs difficultés, mais sont également venus effectuer un travail de réseau. « Je suis entrepreneuse dans l’âme, mon premier objectif est de rencontrer différentes entreprises, pour puiser de l’inspiration et des idées, explique Fatoumata Ba, dirigeante de Jumia, leader du e-commerce sur le sol africain. Ce sommet est également l’occasion de nouer des partenariats. Nous avons la volonté de devenir l’Alibaba de l’Afrique et d’interconnecter encore plus de PME. Grâce à la reconnaissance du digital en Afrique, nous renvoyons une image positive de l’entreprenariat africain et nous attirons davantage de capitaux, même si, avec plus de 600 millions d’euros déjà levés, Jumia détient une place privilégiée. »
Et comme avec Alibaba, Fatoumata Ba s’est vu proposer un accord « business friendly » de la part de Didier Parakian, président de la commission Economie et Innovation d’Aix Marseille Provence et adjoint au maire de Marseille. « C’est un accord unique entre une entreprise et un territoire, précise-t-il. Nous avons emmené 50 entreprises au siège d’Alibaba, elles ont signé des accords et maintenant la Provence se vend en Chine. On pourra peut-être bientôt dire que la Provence se vend en Afrique. » « Ce sommet est également un moment où l’on fait de la relation publique, reprend la dirigeante de Jumia, ce qui peut être générateur de croissance pour l’entreprise. »
La métropole, terre d’accueil des start-up africaines
Les incubateurs et acteurs du territoire se sont relayés pour présenter leurs actions, afin d’attirer les entrepreneurs africains, à l’instar de P. Factory, Le Carburateur, La Coque, l’Agence française de développement (AFD), Accede Provence, Ecosys ou encore Marseille Innovation, historiquement proche de l’écosystème africain. Après le réseau Medinnov qu’elle a créée entre 2005 et 2011, l’incubateur a participé au programme d’Aide à la Création d’Entreprises Innovantes en Méditerranée (PACEIM) entre 2010 et 2015, qui permettait aux étudiants en formation supérieure en France de créer une entreprise à vocation technologique ou innovante en Afrique.
C’est aujourd’hui le programme MeetAfrica qui prend le relais et accompagne 80 diplômés de l’enseignement français ou allemand pour la création, dans leur pays d’origine (Algérie, Cameroun, Mali, Maroc, Sénégal et Tunisie), d’une entreprise à fort caractère technologique, ou porteuse de solutions innovantes, dans les domaines agricole, industriel ou de services. MeetAfrica, dispositif européen dont Marseille Innovation est partenaire, est financé à hauteur de 1,7 million d’euros.
Un écosystème implantable sur le territoire
Medtruck est une start-up créée par l’ingénieur biomédical marocain Anass El Hilal, et propose un service de santé mobile. Sur le même principe que les foodtrucks qui proposent des repas, les camions de Medtruck apportent les traitements aux patients qui jusqu’ici devaient effectuer plusieurs dizaines de kilomètres pour recevoir des soins. « Au Maroc, un tiers des insuffisants rénaux n’ont pas accès à leur traitement, explique Anass El Hilal. Pour ceux qui sont pris en charge, rejoindre leur centre de dialyse est un vrai parcours du combattant. Les longues distances à parcourir dans des conditions souvent difficiles rendent le traitement encore plus pénible. L’idée est de faire en sorte que chaque patient soit à moins de 20 minutes de ses soins. » Mais la désertification médicale est également une réalité française. La start-up teste ainsi ses camions-hôpitaux à Montpellier et en Ile-de-France. Pourquoi pas, bientôt, sur le territoire Aix-Marseille ?
De même, le Niger et la Provence connaissent des problématiques de sécheresse. Tech-Innov, créée par Abdou Maman, propose des services destinés à faciliter le quotidien des exploitants agricoles ainsi qu’à augmenter leur rendement grâce aux nano-capteurs et à la big data. « Nous commercialisons des kits de télé-irrigation, un procédé technologique qui permet à un agriculteur de piloter à distance le système d’irrigation de son exploitation agricole, quelle que soit sa position géographique, suivant une distribution intelligente de l’eau : besoins, quantité, temps, type de spéculation. » Cette solution innovante pourrait ainsi résoudre le stress hydrique, au Sahel comme en Paca.
Tubaniso, futur campus d’agribusiness malien, calque son modèle sur thecamp
Le Projet Tubaniso est le projet du plus grand centre d’incubation et d’innovation au Sahel, construit sur 60 hectares, à 20 minutes de Bamako, tourné vers l’agribusiness. L’idée est de rassembler en un même lieu grands groupes intervenant sur le marché, start-up, programmes gouvernementaux, etc. Dans une région, où le chômage est endémique et l’émigration forte, mais les ressources humaines et naturelles bien riches, les acteurs du marché agro-alimentaire ont saisi l’urgence de faire sortir de terre ce campus, supporté par la BIM, la Banque internationale pour le Mali, afin de faire ressortir toutes les possibilités et les innovations dans le domaine. « Nous souhaitons développer les relations avec les acteurs de l’économie du territoire Aix-Marseille, un bassin d’emploi formidable dans le domaine du numérique et de l’innovation, explique Alexandre Laure, de la BIM. Thecamp est un modèle. »Plus d’une centaine d’installations seront ainsi mises en place : bureaux, salles de formation, de conférences, dortoirs, pépinières, entrepôts. Les entrepreneurs disposeront des meilleurs outils techniques et agricoles, ainsi que d’une eau et d’une électricité propres. Tubaniso deviendra ainsi le hub régional pour le développement et la compétitivité économique du Sahel. L’objectif : réduire les inégalités et la pauvreté afin de permettre un retour progressif à la stabilité de la région.