Beaucoup de questions mais peu de réponses… Alors qu’à quelques centaines de mètres, à la même heure, 700 invités fêtaient l’inauguration de la Tour La Marseillaise, l’ambiance était beaucoup moins festive dans l’ancien dock du port autonome de Marseille. L’association Latinissimo, l’actuel locataire du Dock des Suds tire la sonnette d’alarme et lance un appel au secours pour sa survie. Autour du président Marc Aubergy, les membres fondateurs de l’association ont fait savoir lors d’une conférence organisée jeudi 25 octobre 2018, que l’avenir du site, propriété depuis 2008 d’Euroméditerranée, n’est toujours pas fixé malgré les demandes répétées envoyées à la direction générale d’Euroméditerranée. Latinissimo qui entretient des « relations assez régulières » avec l’organisme, obtient pourtant des réponses mais qui « quand elles ne sont pas contradictoires, restent floues ou absentes » selon Marc Aubergy.
Dernier document en date, un relevé de décisions prises lors d’une réunion de concertation à laquelle l’association participait. « Son contenu précise que notre maintien est assuré jusqu’à nouvel ordre et que l’établissement s’engage à rechercher un lieu de substitution, dans l’hypothèse (où le Dock devrait déménager) « à l’identique » sur le périmètre d’Euroméditerranée 1 ou 2, incluant un délai accordé de 6 mois pour un éventuel déménagement » détaille Marc Aubergy.
Mises à part des rumeurs sur différents projets envisagés sur le site du Dock des Suds apprises « par voie de presse », la situation semble donc au point mort. Latinissimo n’a, aujourd’hui encore, qu’une autorisation d’occupation temporaire « sans droit ni titre » et de très rares subventions pour faire fonctionner le site. Un séjour sans bail qui se transforme en handicap quand il s’agit de faire signer des investisseurs ou de postuler à des financements européens.
« Il nous faut une petite aide financière »
Latinissimo fondatrice des festivals Fiesta des Suds et Babel Med en appelle « à tous les responsables élus des collectivités territoriales, à l’État, et à [leur] propriétaire pour qu’une réponse décisive soit fournie et rapidement connue afin d’éviter le pire pour 2019 ». L’association demande un soutien financier par le biais de subventions de fonctionnement exceptionnelles pour compenser le montant du loyer annuel, une révision de ce loyer et l’attribution d’un bail pour 5 ans minimum. « Avec de telles réponses, nous pourrons proposer un projet de réaménagement pour une rénovation du Dock, un programme de multi-activités qui répond aux besoins diurnes des nouveaux habitants de ce quartier et la poursuite de notre programmation culturelle », envisage Marc Aubergy. Et Bernard Aubert, directeur artistique de la Fiesta des Suds, d’ajouter : « Il nous faut une petite aide financière, on parle de 200 000 à 300 000 euros maximum. Regardons tous les budgets qui sont autour, ce n’est rien du tout ! ».
Un « équilibre fragile » des comptes
Latinissimo doit faire face depuis quelques années à un « équilibre fragile » des comptes. Le financement exclusif des frais fixes est assuré par le chiffre d’affaires que génère les activités du Dock des Suds. La période de 2015-2016 a été particulièrement préoccupante, comme pour les autres festivals, marquée par une baisse de la fréquentation à la suite de la série d’attentats survenus en France. A cela s’est ajouté un poste de sécurité de plus en plus coûteux, en hausse en moyenne de 43% depuis trois ans, accompagné d’une concurrence culturelle de plus en plus importante à Marseille. L’association avait notamment répondu à ces difficultés par la mise en place d’un plan drastique de réduction des charges fixes et le licenciement de deux salariés pour motif économique.
Les comptes sont aujourd’hui à l’équilibre après avoir été déficitaires en 2015 et en 2016 – un déficit cumulé de moins de 10% du chiffre d’affaire annuel. Mais à partir de janvier 2019, Latinissimo devra ajouter les créances auprès de fournisseurs et partenaires à ses dépenses. « C’est ce qui nous préoccupe », commente Marc Aubergy. Un juge doit d’ailleurs statuer sur le plan de sauvegarde du Dock des Suds le 11 décembre.
Tout reste envisageable pour l’avenir du site, y compris la fermeture. « Si les politiques prennent la décision de le faire arrêter ce sont eux qui prennent la décision. Si la justice prend la décision, c’est la justice qui la prend. Ce ne sera en aucun cas notre décision à nous », clarifie Jacques Lantelme, le trésorier de l’association. En attendant, les réservations pour organiser des événements dans le Dock affichent déjà presque complet jusqu’en juin 2019. Une bonne nouvelle qui témoigne de l’attractivité renouvelée du lieu dans un quartier complètement transformé ces dernières années.