par Christian Apothéloz.
« D’après toi, qui sera le prochain maire de Marseille ? » La question se fait de plus en pressante auprès du journaliste que l’on croit « bien informé ». Depuis le début de l’année et avec une accélération sensible, la municipale s’installe comme l’échéance première. La loi NOTRe, après les lois de décentralisation diverses et variées, a pu déshabiller Monsieur le Maire de beaucoup de ses prérogatives et de ses moyens, le fauteuil du premier magistrat reste prestigieux, il est celui de la plus forte personnalité de la Cité, tant au plan politique que symbolique. Alors que dans le même temps nous n’avons aucune assurance sur l’élection au suffrage direct de ceux qui décident, à la Métropole.
[pullquote] Peut-on à 14 mois, prévoir quoique ce soit ? Certainement pas.[/pullquote] Et les Marseillais ont raison de se focaliser sur ce scrutin. Au soir des municipales, en mars 2020, quand les dépouillements révéleront un nouveau visage de la France profonde, trois villes, celles du PLM, seront dans le focus des commentaires. Paris qui est toujours pour le pouvoir en place, ou un allié ou une place de reconquête pour l’adversaire, Lyon sauf cataclysme restera lyonnaise, mais Marseille sera dans le collimateur. La fin des années Gaudin, 24 longues, trop longues années, l’intérêt, l’affect affiché du Président de la République pour la cité phocéenne, l’engagement de la France insoumise, le risque du Rassemblement national vont attirer tous les médias. Et le basculement, ou non, vers la majorité présidentielle de Marseille sera l’un des événements majeurs du quinquennat.
Or donc, peut-on à 14 mois, prévoir quoique ce soit ? Certainement pas.
Et je vais analyser pourquoi. Par contre au lieu de suivre l’écume des jours, je vais présenter mes cinq clefs pour ce scrutin hors normes.
• Tout peut changer et vite
• La tectonique des plaques
• Citoyen, a voté… citoyen a fuité…
• Une tragédie grecque
• Une histoire d’amour
Certains croient encore aux trajectoires linéaires, aux courses tranquilles et balisées, aux desseins venus de loin. Le temps politique s’est redoutablement accéléré. Nous sommes à 14 mois des municipales. Souvenez vous à 14 mois des présidentielles Emmanuel Macron était encore ministre et déclarait sur Europe 1 : « Bien sûr que je souhaite que François Hollande soit candidat. » En quelques mois, les présidentiables se sont enlisés uns après les autres, les sondages ont fait du yoyo et chaque épisode a laissé sur le bord de la route ses victimes du jour. Le temps médiatique fait son œuvre et peut à tout moment chambouler toutes les stratégies et tous les plans de communication. Nous venons de le vivre à Marseille. Lorsqu’ils se sont lancés, à pas feutré, dans la compétition, Martine Vassal comme Bruno Gilles se sont abrités sous le parapluie Gaudin revendiquant un parrainage, un héritage, une succession tranquille.
[pullquote] A Marseille, plus qu’ailleurs, le siège municipal se conquiert et ne s’hérite pas. [/pullquote] Arrive l’effondrement de la rue d’Aubagne et ce lien devient vite embarrassant, sortent comme par miracle des plans de résorption de l’habitat insalubre et l’on n’est pas loin du devoir d’inventaire. L’ombre de Jean-Claude Gaudin est devenue en quelques semaines une malédiction.
C’est un exemple, il y en aura d’autres, car la médiatisation ultrarapide, les possibilités de réaction hors des canaux officiels ou filtrés, font que chaque événement génère immédiatement un effet dévastateur. Ajoutons qu’à Marseille plus qu’ailleurs le siège municipal se conquiert et ne s’hérite pas. La cité phocéenne n’a jamais connu de maire adoubé par son prédécesseur, de passage tranquille de relais, de continuité programmée.
A lire a semaine prochaine, le 2e volet de l’analyse de Christian Apothéloz
Municipales Marseille : la tectonique des plaques (2/5)