La pose de la première pierre du Conservatoire national de la mémoire des Français d’Afrique du Nord a eu lieu vendredi 6 octobre à Aix-en-Provence. Ce conservatoire aura pour mission de rechercher et conserver les documentations concernant l’Algérie, le Maroc et la Tunisie durant la période française.
Qu’ils se nomment «pieds noirs», «rapatriés», «harkis» ou «anciens d’Afrique du nord», ils auront bientôt à Aix-en-Provence un nouveau lieu où entretenir leur commune hérédité d’outre Méditerranée.
En 2019, avenue de l’Europe, entre la maison du maréchal (Juin) et l’aire sportive de la Mareschale, se dressera une façade colorée en jaune : le Conservatoire national pour la mémoire des Français d’Afrique du nord.
Vendredi 6 octobre a été scellée la première pierre de l’édifice. Pas un simple parpaing, elle comporte des fragments venus de trois pays d’en face. Maroc, Tunisie et Algérie, bien sûr ; des sachets de sable du Sahara, un peu de terre prélevée à Oran et Alger. Avant les discours protocolaires de la cérémonie, ont été lues quelques pages d’Albert Camus, d’Helie Denoix de Saint Marc et du Bachaga Boualem.
Foule grisonnante
En présence des représentants des quatre principaux cultes (catholique et protestant, juif et musulman), les artisans majeurs de cette réalisation saluaient la nombreuse assistance, à forte dominante de cheveux blancs. Druon Note – industriel de pharmacie à Allauch et Rousset – préside la Fondation pour la recherche historique sur l’Algérie, affiliée à la Fondation de France. Une organisation parvenue à collecter, auprès de mécènes et donateurs, en moins de sept ans, plus d’un million et demi d’euros, soit le tiers du coût de ce projet mémoriel.
La Ville d’Aix cède le terrain pour un siècle et verse 750 000 €. La métropole AMP en ajoute 500 000 euros, tandis que le Département des Bouches-du-Rhône comme le Conseil régional de Provence-Alpes-Côte-d’Azur abondent chacun à hauteur de 900 000 €. À noter, en creux, l’absence du moindre appui étatique.
«Notre caroubier»
Au total, l’édification coûtera 4,5 millions. Il s’agit d’offrir aux chercheurs et aux historiens, comme aux étudiants ou simples curieux, un accès aisé à plus de cent vingt mille documents, reflets de 132 ans de présence française au Maghreb.
Livres, films, journaux, cartes et affiches ou certificats officiels, mais aussi témoignages familiaux et personnels, récits écrits ou oraux. Ce sera « notre caroubier », confie, avec émotion, un natif de Bône, la poitrine ornée d’un placard de médailles multicolores. Au nom du Centre de documentation historique sur l’Algérie, qu’il préside, Joseph Pérez exprime sa joie de pouvoir bientôt prolonger de plusieurs kilomètres ses lignes d’archives, à deux pas de l’arrêt de bus Tubingen.
Longue attente
Mesdames Joissains et Vassal, puis Renaud Muselier firent assaut, dans leurs propos, d’hommages aux descendants de ces familles parties, parfois dans le dénuement, bâtir, cultiver et croître sur l’autre rive du bassin. 55 ans après le « douloureux exode » du retour, malgré une longue attente, ponctuée de malentendus et de tergiversations, les nombreux bénévoles du souvenir espèrent que ce mémorial contribuera demain à favoriser une perception apaisée et lucide de ce que fut l’implantation française au nord de l’Afrique. Sur une terre qui demeure, aux yeux de Camus, celle « du bonheur, de l’énergie et de la création ».
Lien utile
> Centre de documentation historique sur l’Algérie.