Cette Marseillaise d’adoption vient de passer un an avec sa famille à San Francisco, la métropole innovante de l’ouest américain. Invitée par Gomet’, Audrey nous propose dans ses Chroniques de San Francisco de partager son expérience et son vécu à travers une série d’articles consacrés à des thèmes de de la vie quotidienne. Un regard stimulant et inspirant pour notre propre métropole. Sur bien des sujets, San Francisco peur servir d’exemple. Merci Audrey. Go !
………………………
Nous avons débarqué à San Francisco en Californie pour la rentrée de septembre 2015, enthousiastes de vivre une telle expérience en famille. Un an en Californie à 4, ça n’arrive pas tous les jours ! Nous sommes arrivés un jour de grand soleil. Pas l’ombre du légendaire “fog” et un Golden Gate Bridge visible de bout en bout qui tient ses promesses de monument légendaire. Rues larges, maisons basses, arbres en fleurs et océan à perte de vue, terrains de basket et de tennis tous les 3 pâtés de maisons et demi… On pense à Steve Mc Queen dans sa Ford Mustang, Kim Novak tantôt blonde tantôt rousse… On cherche la Maison Bleue, on regrette de ne pas avoir relu les Chroniques de San Francisco d’Amistead Maupin. Bref, on cherche les références connues et on absorbe tout ce qu’il y a à voir par les fenêtres du taxi de l’aéroport, un peu sonnés par le décalage horaire.
Une douce odeur de jasmin
Nous arrivons en fin d’après-midi du jour de ramassage des ordures et en bas de notre immeuble, au milieu d’une rue en pente comme il se doit, je constate distraitement un bel alignement de poubelles tout le long de la rue, façon dominos. Tout aussi distraitement je note le décalage entre ce que voient mes yeux et l’odeur enregistré par mon appendice olfactif : une douce odeur de jasmin… A tel point que je pense d’abord que les poubelles ont été parfumées. Je mets ça sur le compte d’une excentricité de voisinage et relègue les détritus à un plan très éloigné de mes préoccupations de nouvelle arrivante. Jusqu’à l’installation du quotidien… Mais ce premier contact avec les déchets de San Francisco marque le début d’une histoire d’amour et d’écologie avec notre ville d’adoption pendant un an.
Dans notre cuisine : trois poubelles. Dont l’une de plus petite taille avec des trous, posée immédiatement à côté de l’évier, pour le compost. Les deux autres de même taille sont dédiées au recyclage et aux ordures générales. Dans la cour de notre immeuble : 3 poubelles. Une immense bleue, une verte moyenne et un noire étroite. A l’instinct je dédie la verte aux ordures organiques, la noire au recyclage papier, verre, et autres et la bleue à tout le reste. Mais en une fois les bacs ouverts, c’est une autre histoire qu’on me raconte… J’ai un point sur trois, la verte au vert, c’était facile. Mais j’ai interverti les deux autres.
A l’école, les gourdes préférées aux petites bouteilles en plastique.
A San Francisco : on recycle bien plus que l’on ne jette… Verre, papier, plastique, carton, couverts en plastique, gobelets Starbucks, tout y passe. On dédaigne les petites bouteilles en plastique au profit de l’eau du robinet dans des gourdes. Le polystyrène est proscrit des emballages. A l’école, on demande aux parents d’emballer dans des boîtes les pique-niques et goûters des enfants. Dans tous les fast-foods et même dans certaines rues ou centres commerciaux, on retrouve notre trio gagnant de poubelles colorées…
Tous collaborent avec plus ou moins d’entrain pour remplir l’objectif ambitieux que s’est fixé San Francisco : devenir à l’horizon 2020, une ville sans déchet. On pourrait croire à une « galléjoke », mais force est de constater qu’elle arrivait à un taux de recyclage de quasiment 80% en 2014 (source Recology.com). Et s’approche de son objectif, grâce notamment à des travaux conséquents d’amélioration du Pier 96, l’usine de recyclage de près de 20000 mètres carrés, située dans SF, prête à traiter les matériaux recyclables qui grimpent traditionnellement de 15 % au moment des fêtes.
Un compost revendu aux agriculteurs de la région
En plus d’employer 178 personnes issues des quartiers défavorisés de San Francisco, l’usine du débarcadère 96 (“Pier 96”) traite plus de 640 tonnes de déchets pas jour. Et à 40 km de là, à Vacaville, tout ce qui relève des ordures organiques est transformé en compost. Ce dernier est revendu aux agriculteurs de la région, dont les viticulteurs de la Napa et de la Sonoma Valley qui ont redécouvert pour l’occasion les vertus multiples de cet engrais naturel. Dont celle de particulièrement bien conserver l’humidité de la terre, plus qu’appréciable en ces temps de sécheresse.
La grande force de la ville aura été d’allier une véritable volonté politique à l’adhésion de sa population pour atteindre son objectif. Et le recyclage est tellement entré dans les mœurs qu’une rumeur urbaine rapporte que les employés de Recology (la société de récolte des déchets de SF) ont un jour trouvé un cadavre humain dans la poubelle verte !
Audrey
(Illustrtaion : capture d’écran Recology / Larry Strong DR)