« Construire l’usine étendue du futur », telle est l’ambition affichée du projet Henri Fabre, un nom inspiré de l’inventeur marseillais de l’hydravion. Porté à l’origine par Airbus et EDF, ce programme vise à développer un pôle industriel multifilières (aéronautique, énergie, naval, chimie, numérique, médical…) sur 175 hectares en cours d’aménagement à Marignane, Vitrolles et Saint-Victoret. Lancé en 2012, il franchit une nouvelle étape avec l’inauguration officielle vendredi 23 septembre de son technocentre, un bâtiment dédié à la recherche et à l’innovation pour les entreprises du pôle. Les membres du Team Henri Fabre ont investi 12 millions d’euros pour se doter des machines industrielles dernier cri : Bras robotisés, imprimantes 3D, cabines de peinture… Ces équipements peuvent coûter jusqu’à près d’un million d’euros, « un investissement qu’aucune PME ne peut se permettre seule. C’est la mutualisation des moyens et des compétences qui font du technocentre la pierre angulaire du pôle », insiste Stéphane Magana, directeur du projet Henri Fabre.
Le vrai technocentre à venir pour 2020
Pour l’heure, six structures sont installées au sein du technocentre qui fonctionne déjà depuis janvier dernier. Il est composé de trois plateformes : un laboratoire de caractérisation physico-chimique des matériaux, une plateforme sur les revêtements du futur et une autre sur le formage et l’assemblage mécanique. Le bâtiment qui s’étale sur 2 100 m² n’est en fait qu’une première étape préfigurant un technocentre plus ambitieux de 16 000 m² qui devrait voir le jour en 2020. « Nous attendons désormais une décision politique qui pourrait intervenir l’année prochaine pour lancer la réalisation du futur technocentre », explique Stéphane Magana. Les élus des principales collectivités étaient d’ailleurs tous présents pour cette inauguration afin d’assurer les industriels de leur soutien.
Un titanesque chantier d’aménagement pour les collectivités
Le préfet de région, Stéphane Bouillon, le maire de Marseille et président de la Métropole, Jean-Claude Gaudin, la présidente du département, Martine Vassal, et Renaud Muselier, premier vice-président de la Région, se sont tous déplacés pour l’événement. Dans leurs discours, ils se félicitent chacun de participer financièrement à l’opération : 30 % pour le Conseil départemental, près de 60 millions pour la Métropole… L’aménagement d’un projet de cette envergure coûte très cher et reste difficile à évaluer. Le pôle Henri Fabre est en fait composé de trois zones d’aménagement concertées : le technoparc des Florides à Marignane où se trouve le nouveau technocentre, le parc d’Empallières à Saint-Victoret et Cap Horizon à Vitrolles. La première zone est opérationnelle depuis 2010 et 40 ha supplémentaires doivent être livrés dès l’année prochaine. A Saint-Victoret, les 18 ha prévus seront mis sur le marché dans quelques mois et Cap Horizon suivra dans la foulée.
Le casse-tête de l’accessibilité
A l’horizon 2020, les pouvoirs publics misent sur la création de 7 000 emplois supplémentaires sur le périmètre. Aujourd’hui, ce sont déjà 22 000 personnes qui se rendent chaque jour sur la zone. Une tache pharaonique attend donc les pouvoirs publics pour transformer un réseau routier régulièrement saturé et proposer une offre de transport en commun efficace. Intégration de la Gare de Vitrolles Aéroport dans le projet Cap Horizon, restructuration du Pôle d’échanges de la gare TER de Pas des Lanciers, mise à quatre sens de l’échangeur de Carry le Rouet, réalisation d’un second rond-point d’accès au Technoparc desservant le nouveau Pôle d’échange des Florides… Les travaux prévus pour améliorer la desserte de la zone sont très nombreux et pour le moment, le calendrier reste flou. « Qu’on vienne de Marseille ou d’Aix, c’est une véritable corvée de venir en voiture. Il faut souvent compter une heure de plus en heure de pointe. C’est l’un des principaux problèmes à régler pour s’assurer de l’attractivité de la zone », avoue un ingénieur salarié d’une entreprise déjà installée sur le technoparc des Florides.
Expiris : « Grâce au tehnocentre, on a doublé nos effectifs »
Spécialisée dans l’expertise autour des métiers du traitement de surface pour les secteurs industriels, Expiris est l’une des premières entreprises à s’être installée sur le technocentre. Elle a investi 1,6 million d’euros dans un laboratoire de caractérisation physico-chimique des matériaux. Auparavant installée dans les locaux d’Airbus Hélicoptères à Marignane, le groupe aéronautique lui a proposé de s’installer sur le technocentre : « J’ai sauté sur l’occasion d’intégrer un projet aussi innovant qui aller, à coup sûr, nous permettre d’élargir notre clientèle », raconte Bernard Giovannoni, dirigeant de la société. Cette nouvelle est également arrivée aux oreilles de deux groupes toulousains travaillant dans l’aéronautique, Gaches Chimie et STTS, qui ont racheté Expiris en fin d’année dernière afin de profiter des opportunités offertes par le projet Henri Fabre : « Un plus indéniable dans la vente », estime Bernard Giovannoni. Depuis son arrivée au technocentre, l’équipe d’Expiris est passé de 8 à 16 salariés et elle espère passer à 25 en 2020. Grâce aux équipements de pointe installés au technocentre, l’entreprise se positionne sur de nouveaux marchés comme la grande plaisance ou l’énergie avec des projets pour EDF. Elle travaille sur des projets de recherche de grande envergure comme Marco Polo (MAgnésium Résistant COrrosion Peinture Optimisée Liant Organique), qui vise à développer une protection innovante anticorrosion. Avec le Collège de France, elle développe également un revêtement composite à mémoire et surperhydrophobe, un projet financé par la Direction Généralement de l’Armement : « Notre présence à Henri Fabre nous permet de répondre à de plus gros appels d’offres aux côtés des grands groupes partenaires », affirme le patron de l’entreprise.