Portefeuille à gauche
On connait le bon mot : « ils ont le cœur à gauche, mais le portefeuille à droite ». Deux acteurs de la vie politique marseillaise, Samia Ghali et Jean-Luc Mélenchon, sont empêtrés depuis quelques jours dans cette contradiction. La première, enfant pauvre mais talentueuse de l’immigration algérienne est élue des quartiers nord. Elle est montrée du doigt depuis que le parquet financier a envoyé ses fins limiers vérifier les conditions dans lesquelles elle a fait prospérer son patrimoine immobilier. En cause, l’achat d’une villa estimé à 1,3 million au Roucas Blanc, quartier où le Rmiste est aussi rare que les rougets dans le Vieux-Port. La sénatrice se défend bec et ongles, plaidant la transparence et s’étonnant qu’on interdise la réussite sociale à ceux qui n’ont pas forcément pu bénéficier de l’ascenseur social. M. Mélenchon se voit reprocher quant à lui d’avoir utilisé la classe business, pour se rendre en avion à la Réunion, pendant que ses collaborateurs étaient relégués en classe économique. Alexis Corbière, un de ses fringants guerriers, a ferraillé sur les ondes arguant d’un mal au dos pour celui qui ne ménage pas ses efforts, depuis qu’il a perdu la présidentielle mais gagné le leadership à gauche. Bon, on n’a pas encore vu et l’une et l’autre en chaise à porteurs. Les damnés de la terre peuvent toujours compter sur eux.
Mélange des genres
L’automne sera chaud jurent les syndicalistes les plus motivés. La colère des uns n’a pourtant pas, a priori, les mêmes causes que celles des autres. La lutte contre les désormais fameuses ordonnances sert de cache sexe à une somme hétéroclite de revendications qui déferle sur la rue. Dans la même semaine, à Marseille et dans le département, on aura vu s’associer les opposants à la loi travail, les défenseurs du service public, les inconditionnels du statut des cheminots, les bénéficiaires des APL, les étudiants mal orientés ou désorientés en attente de masters, les tenants d’une agriculture sans contraintes écologiques. Pour ajouter à ce feu d’artifice multicolore, s’y sont agrégés les CRS, priés par la Cour des comptes de passer, pour leurs primes de déplacement, par la fiscalisation à laquelle les autres professions sont soumises. Les insoumis, qui mènent la danse avec la CGT dans un improbable pas de deux, espèrent que cette mayonnaise va prendre et parlent même derrière leur leader accusant Macron d’avoir fomenté un coup d’Etat social. Les partis politiques, jusqu’ici dominant, sont prudemment en retrait. « En marche » et ses parlementaires jouent la discrétion quand Les Républicains estiment qu’il est urgent d’attendre des jours meilleurs pour sortir des abris. Le PS en état de mort clinique se cherche un leader et le Front National un nouvel élan. Le PC s’accroche du coup aux branches sociales qui frémissent encore, subissant du coup la loi de Mélenchon le sommant de se rallier à son panache rouge. Jamais à Marseille la situation syndicale et politique n’a été aussi confuse. Les semaines qui arrivent seront-elles un tournant ou une impasse ?
Tous pour Marseille
Samia Ghali (PS), Stéphane Ravier (FN), Bruno Gilles (LR) ont choisi de conserver leur mandat de sénateur plutôt que leur fauteuil de maire de secteur. Valérie Boyer (LR) avait fait de même pour rester députée. La loi sur le cumul les y contraignaient tous. Jean-Claude Gaudin (LR) la mort dans l’âme a fait le contraire en restant premier magistrat de Marseille. Les premiers jurent que leur choix n’a pas été dicté par des considérations financières. Mme Ghali explique même que si elle avait cumulé sa fonction de maire de secteur avec celle de conseillère départementale sa rémunération aurait été identique. Tous sont convaincus que leurs voix seront plus audibles pour faire entendre les problématiques marseillaises à Paris en siégeant au palais du Luxembourg ou au palais Bourbon. On est prié de les croire.
Olympique qu’on vous dit
On aura vu une Marseillaise interpeller sur le Vieux-Port le président Macron pour fustiger une politique trop « libéraliste » à ses yeux et dire au passage tout le mal qu’elle pense des Jeux olympiques. La championne de planche à voile Nathalie Simon est venu en contrepoint dire sur France 3 son enthousiasme à l’idée de voir les marins français se mesurer, en 2024 dans la rade, au reste du monde. Et puis, n’en déplaise à une minorité, Paris et Marseille se sont rapprochées pour vivre main dans la main cette aventure olympique. Anne Hidalgo et Jean-Claude Gaudin ont rivalisé en civilités dans un même enthousiasme. Voilà qui fait du bien. Marseille se voit proposer un projet fédérateur qui génèrera de nouveaux emplois, dynamisera son économie, améliorera encore un peu plus son image. Oui l’important comme l’aurait dit le baron pierre de Coubertin est plus que jamais de participer. On l’a vu cet été pour le tour de France la cité est télégénique, des façades du Vieux Port magnifiques lorsque le soleil passe à l’Ouest à l’horizon que le phare du Planier ponctue comme un index désignant le ciel. C’est mieux que les majeurs tendus des tribunes du vélodrome et les slogans vengeurs désignant le PSG. On dit que parmi les gens de mer il y a souvent des seigneurs. Marseille les attend pour redorer un peu plus son blason.
De la poésie enfin
Sur les panneaux de nos autoroutes s’affichent une jolie rime : « l’air est plus pur quand on covoiture ». La patrie d’Edmond Rostand aurait supporté un alexandrin mais ce décasyllabe vaut son pesant de mots. Il est bien que les pouvoirs publics alertent ces milliers d’automobilistes qui s’entêtent à avoir une pratique solitaire de leurs déplacements. Le phénomène touche malheureusement les moins jeunes comme les plus jeunes. Le spectacle sur les campus de St Jérôme, de Luminy ou encore d’Aix est affligeant. Les étudiants sont majoritaires à rejoindre le lieu de leurs études seuls au volant. Il en va de même pour beaucoup de salariés bunkérisés dans leurs automobiles et augmentant d’année en année les bouchons qui asphyxient les villes. Un élu Aixois, Jacques Lengrand prédisait il y a vingt ans déjà, que la thrombose guettait l’aire métropolitaine. La thrombose se définit comme un caillot de sang qui peut obstruer nos vaisseaux sanguins. On y est, et pour rester sur la métaphore médicale, de récentes études démontrent que cette circulation à l’arrêt est mortelle pour les poumons de ceux qui la subissent, automobilistes ou riverains des grands axes. Les Marseillais passent, dit encore une étude, 29 heures par an dans les bouchons. Ils seraient mieux devant un livre de poésie.
Une rue à la rue
La rue Paradis sort de son purgatoire. La rue St Fé glisse en enfer. Dans la première intelligemment rénovée les belles boutiques refleurissent. Dans la seconde les enseignes ferment et la plus grande d’entre elles les Galeries Lafayette devrait migrer fin décembre vers le stade Orange Vélodrome. On nous dira que c’est la loi du genre. St Fé a eu au début des années 90 son heure de gloire. Puis l’usure s’est irrémédiablement installée. Celle de la rue elle-même mal entretenue comme celle des passants attirés vers d’autres tentations plus périphériques. A Aix après une belle décennie les allées provençales connaissent un certain tassement aussi. Les commerces riverains s’apprêtent à réagir. Rue St Fé le chacun pour soi semble prédominer et la discipline ne semble pas la force de cette armée-là. L’artère est souillée dès l’après-midi, la restauration rapide en étant responsable autant que l’absence criante de civisme des passants. Plus loin la rue de Rome semble souffrir des mêmes maux et l’arrivée du tramway qui a imposé un remodelage aussi confortable qu’esthétique n’a pas inversé le cours du déclin. On verra donc si rue Paradis ceux qui l’animent savent saisir leur chance. Les travaux achevés, elle peut symboliser le renouveau de l’hypercentre comme elle peut être la dernière tentative pour le réhabiliter et le faire revivre.