« Trop vite, trop fort, trop loin ». Ce petit refrain signé Jean-Claude Gaudin, pris et repris, rythme réunions et conseils métropolitains depuis plus d’un an. Pas question donc d’accélérer la cadence, surtout face aux inquiétudes exprimées lors de la dernière conférence des maires. « Le législateur nous a imposé un outil qui est totalement fou, c’est pas la faute du président, c’est la faute à tous ceux qui ont voté et encensé cette Métropole à tout faire » déclare Georges Cristiani, maire de Mimet et président de l’Union des maires des Bouches-du-Rhône. Les craintes résident notamment dans le transfert d’équipements marseillais dans le budget de la Métropole, au regard de la fragilité financière de l’institution.
Prévu à l’ordre du jour du Conseil métropolitain de demain, jeudi 13 juillet, ce rapport a été retiré et ajourné. Un motif de satisfaction pour le maire de Martigues, Gaby Charroux, qui « depuis plusieurs mois dénonce les lourdes conséquences d’une telle décision. Il faut que les critères de l’intérêt métropolitain définissent ce qui doit être transféré ou pas ». Lui a souhaité garder la compétence des équipements de Martigues déjà jugés comme étant « d’intérêt métropolitain », afin d’en assurer la gestion des coûts, des investissements, des activités proposées et « donc la totale maîtrise de la qualité du service rendu dans chacune de ces structures. »
« Sans faire une Métropole à la carte »
Tous les maires de la Métropole ont été consultés au mois d’avril dernier sur les équipements dont ils proposaient le transfert. Au total, 12 communes ont demandé le transfert de 36 équipements sportifs vers la Métropole et 18 communes celui de 38 équipements culturels. Se donner le temps, apporter de la « cohérence et de la lisibilité à notre action », c’est ce que souhaite désormais Jean-Claude Gaudin. « Compte tenu du nombre de demandes et des enjeux pour le rayonnement de la Métropole, il est tout à fait normal, et c’est le but de nos réunions, de débattre sur l’opportunité de certaines de ces propositions et de se donner le temps de trouver un consensus, pour ne pas faire d’arbitrage à l’emporte-pièce. »
Par ailleurs, la présence de l’ensemble des élus un 13 juillet n’était pas garantie pour atteindre le quorum. Néanmoins, « sans faire une Métropole à la carte », pour lui, refuser que les piscines de l’ensemble du territoire soient désormais gérées à l’échelle métropolitaine, « c’est accepter que celles de Marseille restent gérées par la Ville, mais aussi que celles gérées aujourd’hui par les conseils de territoire reviennent demain entre les mains des communes avec la charge financière que cela représente. » Une stratégie que ne partage pas Loïc Gachon. Le maire PS de Vitrolles estime que cette vision est centrée sur les seuls besoins des habitants de Marseille. Jean-Claude Gaudin s’en défend : « Il n’est pas question de favoriser un souhait particulier du maire de Marseille ». En tant que président de l’institution, il dit vouloir « des arbitrages cohérents et garants d’une équité entre les communes et les conseils de territoire. Les pages qui vont s’écrire dans les prochains mois seront déterminantes pour notre institution, car elles donneront tout son sens à la Métropole », mais cela seulement si les 92 maires qui la compose décident d’écrire la même histoire.
REPERES
Le transfert des équipements marseillais et jugés d’intérêt métropolitain vers la Métropole Aix-Marseille Provence a été voté en conseil municipal le 26 juin dernier. Il existe trois familles de transferts de compétences prévus par la loi, à réaliser d’ici au 31 décembre 2017 : ceux liés aux compétences obligatoires (à l’exception de la voirie, décalée à fin 2019-début 2020), les équipements d’intérêt métropolitain et les transferts liés aux compétences facultatives, ou dites orphelines, type fourrière, par exemple.
Le conseil municipal de Marseille a délibéré sur la liste des équipements qu’elle se propose de déplacer vers la Métropole, répartis en trois types. La première catégorie concerne les équipements dont le rayonnement dépasse le cadre communal. Six au total avec l’Opéra-Odéon, l’École supérieure d’art et de design Marseille-Méditerranée, le conservatoire national à rayonnement régional, le stade Orange-Vélodrome (et le stade Delort régi par le contrat de partenariat relatif au stade Orange-Vélodrome et ses abords), le palais omnisport Marseille Grand-Est et le palais des sports (dont le gymnase Raymond-Teisseire attenant), et les équipements culturels de type médiathèques et bibliothèques. Troisième catégorie : les équipements aquatiques et piscines. Des transferts stratégiques pour Marseille, visant ainsi à alléger « le fardeau de la Ville en termes de fonctionnement, de personnel, d’investissement, de travaux… », avait confié Jean-Claude Gondart, directeur général des services de la Ville, lors d’un déjeuner presse préparatoire, en vue de ce conseil municipal. Ils permettent à la Métropole d’assurer l’avenir d’un certain nombre d’équipements et transférer 1 000 personnes et 100 millions d’euros ».
La Clet, la commission locale d’évaluation des charges transférées, installée en janvier dernier, va désormais se charger de l’évaluation des charges financières liées aux équipements transférés pour aboutir à des délibérations concordantes de la Métropole et des communes. Si, encore une fois, ça coince, c’est l’État qui tranchera. Et pour le président de la Métropole, « la pire erreur, irresponsable, serait justement de ne pas choisir comment nous voulons la construire et laisser l’État le faire à la place des élus locaux qui connaissent le territoire. »