Imaginez une sorte d’énorme ballon de rugby : 100m de long , 40 de large, gonflé à l’hélium, et dont l’hélice obéit à un trio embarqué à bord de la nacelle à moteur diesel. Nommé ” Dirigeable – charge lourde “, cet appareil pourrait hisser et déplacer jusqu’à 60 tonnes sur une centaine de kilomètres , en particulier depuis les zones insulaires, ou d’accès difficiles et reculées. Ce qui évite aussi de coûteux aménagements routiers terrestres. Un hélicoptère ne peut soulever plus de 5 à 20 tonnes.. Une grue ne peut être installée sur des secteurs très accidentés. D’où cette idée de grue volante, sur laquelle travaillent l’armée états-unienne, comme la Russie ou l’Angleterre.
Hangar géant
Les Chinois ont eux choisi de s’associer au groupe français “Flying Whales” (baleines volantes), fruit d’un consortium industriel unissant une vingtaine de sociétés , grands groupes ou laboratoires plus modestes. La firme Zodiac et l’office public de l’aéronautique Onera participent à l’aventure. La base aérienne d’Istres, et son gigantesque hangar Mercure (160 m de long, 38 de large et 25 de haut), est prête à accueillir d’ici 2018 les premiers prototypes de cette baleine volante.
Patron de cette PME d’une dizaine de personnes, Sébastien Bougon confie à GoMet’ : « Il ne s’agit pas du projet farfelu d’un savant fou… Deux premiers ministres -français et chinois- viennent de signer, le 2 juillet dernier, à Toulouse un accord de coopération afin de développer cette filière ! » Bougon lui même revient de Chine un mois plus tard. Une partie de ces engins à structure rigide métallique pourrait être fabriquée là-bas.
Rigide gonflable
N’ayant pas besoin de piste d’atterrissage, épargnant l’environnement, ces monstres aériens pourraient transporter des grumes pour l’exploitation forestière, comme les encombrantes pales d’éoliennes. Il s’agit bien entendu d’un marché de niche, sans rivalité ni comparaison avec l’avion cargo ou le porte conteneurs. La réussite de cette filière passe par un financement de l’ordre d’un milliard par an durant l’actuelle décennie – assurent les experts qui planchent depuis 2012 sur ce projet. A mi-chemin entre le drone et le satellite, ce ballon silencieux pourrait aussi servir aux télécommunications ou à l’observation. A condition que son enveloppe ne donne pas prise à des vents trop violents. Le gaz neutre qui l’arrache à l’attraction terrestre (hélium) ne présente pas les risques de l’hydrogène (inflammable) qui mît un terme en 1937 à la navigation du Zeppelin.
Nouvelle France industrielle
L’école de l’air de Salon de Provence, comme le pôle Pégase, le département des Bouches-du-Rhône, la région Paca, et l’agglomération Ouest Provence soutiennent énergiquement cette exploration. Elle a reçu en outre le label officiel de l’Etat , au chapitre des projets d’avenir marquant la “nouvelle France industrielle”!
L’histoire a retenu qu’une quinzaine d’années avant l’invention de l’hydravion par Fabre sur l’étang de Berre, il y a 131 ans, en août 1884, le polytechnicien Charles Renard réalisait, en lisière sud de Paris, le premier vol circulaire d’un “plus léger que l’air”, à propulsion électrique. Baptisé La France, ce dirigeable parcourut 8 km en 23 minutes, à environ 1500m au dessus de Meudon-Villacoublay. Il était long de 52 mètres pour un volume de 1864 mètres cubes et sa batterie embarquée pesait 435 kg.
(Illustration : CCIMP DR)