Poquelin et pacoulin
On le sait quelques régions dirigées par les Républicains ont décidé d’imposer une clause Molière aux entreprises du bâtiment. Il s’agit de contraindre les travailleurs étrangers à une pratique correcte de la langue même si a priori on n’exige pas le niveau de l’agrégation. Jean-Baptiste Poquelin dit Molière voit ainsi post mortem une sorte de reconnaissance lui qui fut enterré de nuit pour satisfaire un clergé sourcilleux. On se demande si cette clause Molière exige simplement une bonne connaissance du champ lexicologique ou si elle impose aussi une bonne prononciation. Si tel était le cas, quelques pacoulins (péquenots en français) méridionaux seraient condamnés au chômage. J’ai souvenir d’un malheureux garçon dans un restaurant connu du cours Mirabeau à Aix qui n’arrivait pas à prononcer le mot Sancerre. Il apportait un Saint-Ser un côte de Provence produit au pied de Sainte-Victoire alors que le client réclamait le vin de Loire connu pour être un des rares rouges à supporter d’être servi frais. La scène se corsa plus tard lorsqu’il décrivit les proportions d’un plat. Il voulait exprimer la règle des trois tiers, sauf que comme de nombreux jeunes Marseillais il disait « tchièr » ce qui laissait perplexe son auditoire. Après la clause Molière faudra-t-il imposer dans le midi la clause Louis Jouvet. Atmosphère…
Parle plus bas
Mme Valérie Pécresse, présidente de la Région Ile de France, n’a pas caché ce vendredi en animant un meeting à Sénas que «le moral n’est pas au beau fixe » et de faire cette confidence aux militants LR « les gens m’engueulent ». Elle parlait évidemment de la difficulté de défendre son champion, François Fillon, mais a-t-elle confié à La Provence « il ne s’est pas retiré. Maintenant on se bat ». On a vu soutien plus enthousiaste même si celle qui avait pendant la primaire soutenu Alain Juppé a cru devoir préciser : « Ma mère est corse, mon père est provençal, alors je sais ce que c’est le sens de la famille ». On le sait depuis la trilogie de Francis Ford Coppola (Le Parrain). Le mot « famille » a une acception très différente, selon qu’on l’utilise au nord ou au sud de l’Europe. D’après les juges, François Fillon a lui aussi une approche très personnelle de la famille.
Macron séduit trop
Le sociologue Jean Viard a décidé de rejoindre Emmanuel Macron (photo archives Gomet’ / JY Delattre) et devrait avoir l’investiture d’En Marche pour les législatives dans le Vaucluse. Un ralliement somme toute logique pour ce social-démocrate un temps élu socialiste à Marseille. Mais celui qui caracole en tête des derniers sondages avec Marine Le Pen attire d’autres convertis venus de camps parfois très opposés. Dans cette liste qui n’en finit pas d’enfler on trouve le centriste Maurice Di Nocera, le divers droite Robert Assante, l’écologiste Karim Zéribi sans oublier tous ceux et celles qui attendent confirmation des tendances de l’opinion pour voler au secours de la victoire. On dit qu’Emmanuel Macron regarde chaque nouvelle recrue de très près. Dans les Bouches-du-Rhône plus qu’ailleurs, il a intérêt à s’entourer d’experts avisés sous peine de voir la reconstitution de ligues dissoutes. Comme on le dit chez les cheminots, « attention un train peut en cacher un autre ». Dans le 13 c’est plutôt des casseroles qu’il faut se méfier.
La lessive attendra
Même si les cadres supérieurs du FN le jurent, il y a encore beaucoup à faire pour nettoyer les écuries d’Augias de l’extrême-droite. Les observateurs qui suivent ce parti depuis qu’il a émergé puissamment dans les années 80 et particulièrement à Marseille savent que dans ses rangs prospèrent les hommes et les idées les plus radicales. On y trouve encore des maurassiens convaincus, des anciens de l’OAS, des ex-militants du GUD et du mouvement Occident… La liste est non exhaustive. Mais il est vrai aussi que le FN a appris à communiquer, à maîtriser les outils de l’Internet, à imposer à ses plus braillards des éléments de langage susceptibles de rassurer les plus indécis. Pour autant et Stéphane Ravier, le sénateur-maire des quartiers nord qui a fait allégeance à Marine, rappelle volontiers que c’est Jean-Marie Le Pen qui lui a appris « le sens de la discipline et la fidélité au parti ». Lorsqu’il prononce ces mots, il faut comprendre le parti et les idées promus par le père, pas celles de la garde rapprochée de la fille dont il ne fait pas partie. Florian Philippot et Gilbert Collard peuvent s’égosiller, la culture profonde du FN n’est pas un point de détail. Elle n’attend que le pouvoir pour s’installer.
La bonne direction
Les travaux de la départementale 559 entre le rond-point de Mazargues et le campus de Luminy sont en voie d’achèvement. On s’en réjouit après de très longs mois d’attente. On se félicitera notamment du confort enfin réservé aux cyclistes qui peuvent emprunter une piste bien aménagée, des efforts de décoration avec des plantations en devenir, des couloirs réservés aux bus qui permettront aux étudiants, enseignants et autres personnels de choisir les transports en commun plutôt que la voiture individuelle. On regrettera cependant une petite portion où sur une vingtaine de mètres on a installé en bordure de route des places de parking en épi. Les automobilistes doivent effectuer des marches arrière pour s’y installer en interrompant ainsi brutalement le trafic. Cela semble une constante dans cette ville. On imagine puis réalise des chantiers tout à fait nécessaires puis un grain de sable, imposé par quelques intérêts particuliers, vient gripper les meilleures intentions. On se souvient ainsi de la rue Breteuil baptisée un temps « axe fluide » avant que le ridicule n’atteigne ses promoteurs. Il eut fallu pour mériter cette appellation ambitieuse que les deux voies soient libérées sur toute la longueur puisqu’il s’agit d’un axe qui permet de relier l’ouest à l’est de la ville. Mais cette belle fluidité fut rapidement sapée par des emplacements réservés ou quelques places de stationnement dont la nécessité n’étaient pas impérieuses. A moins qu’il y ait eu derrière tout ça, cette part de clientélisme sans laquelle Marseille ne serait pas Marseille.
Pujol claque au vent
On s’était félicité de son prix Albert Londres. Il récompensait une série d’articles parus dans La Marseillaise appelée « quartiers shits ». Philippe Pujol, sociologue au bagout efficace, nous plongeait dans ces espaces marseillais où la drogue, l’argent et la violence, corollaire obligé, font bon et mauvais ménage. Puis vint La Fabrique du monstre prolongement littéraire logique de sa démarche journalistique dont le succès en librairie perdure si on se réfère à sa place très honorable sur les rayons. Notre confrère sera le co-scénariste de la deuxième saison Marseille – produite et réalisée par Netflix. On espère qu’il apportera une plus-value à cette fiction où Gérard Depardieu surnagea pendant que se noyait dans le ridicule Benoit Magimel imitant pathétiquement l’accent marseillais. Pujol, enfin, vient de consacrer un peu plus de cent pages à « Mon Cousin le fasciste » (Editions le Seuil). Il y croque sans caricature son parent Yan Benedetti. C’est un des penseurs de l’Œuvre Française qui exhibe comme emblème la croix celtique avec cette incantation « Défends ta peau, défends ton drapeau ». Philippe ne se fait pas juge mais il décrypte une pensée qui l’effraie, et regarde sans haine un cousin qui attise sa curiosité. En bon journaliste donc…