Vous avez dit Marseille
Pour ceux qui ne l’avaient pas encore compris, Jean-Luc Mélenchon l’a expliqué clairement cette semaine. Marseille c’est la France. Plus exactement la France insoumise. C’est pour cette unique raison qu’il n’accepte pas le reproche de parachutage, puisqu’il se sent chez lui aussi bien sur les rives du Vieux Port qu’aux pieds des anciens crassiers du nord. Certains observateurs zélés décrivent des foules accourant des immeubles, pour toucher de près le prophète d’une révolution à venir. On leur répondra prudemment que la ville qui a fourni à la téléréalité la troupe désopilante des Marseillais à Miami, s’entiche facilement de ceux qui tiennent la vedette sur le petit écran. De là à conclure qu’il y a dans nos cités, une majorité prête à construire une VIème République, à balayer l’Europe et accessoirement à bousculer le grand capital pour tendre à quelque destinée bolivarienne, est un pas qu’il serait bien imprudent de franchir. La marche de Mélenchon sur la 4ème circonscription, pour ceux qui ont un peu de mémoire, fait penser aux premier pas de Bernard Tapie en politique. C’était en 1988 face à Guy Teissier. Il distribuait des ballons à ses fans, improvisait au fil des rencontres son programme, promettait la lune à des « gens », épatés d’avoir pu l’approcher. On connait la suite. On attend celle du leader des insoumis. On peut se réjouir par contre d’une information : la France Insoumise a désormais sa « maison » rue de Fondère dans le 4ème. Espérons que ce n’est pas une maison de… passage.
Mennucci, tant aimé
Le député socialiste sortant de la 4ème, Patrick Mennucci, s’est longtemps amusé du penchant de Jean-Claude Gaudin pour les petites siestes en public. Il faut pourtant toujours se méfier des Raminagrobis. On croit qu’ils dorment, et un méchant coup de griffe vient vous rappeler à la cruelle réalité. Le sénateur-maire ne s’est ainsi pas endormi, lorsqu’il a appris que l’adversaire vedette de son « ami » Patrick Mennucci, serait Mélenchon. L’insoumis est même venu chercher son onction en demandant audience au premier magistrat. Gaudin n’a pas boudé ce plaisir et il a montré autant d’empressement, si ce n’est plus, à ouvrir la porte de son bureau au tribun de l’ultra gauche, que pour Alain Juppé lors de la primaire de la droite. Certes il a confié qu’il avait relégué le programme dédicacé de Mélenchon, dans un placard, mais sa légendaire courtoisie n’a pas été prise en défaut. Mennucci du coup se retrouve un peu seul pour affronter 19 adversaires. Il devra surtout compter avec ses ennemis les plus intimes et, à se balader sur la toile on voit ressurgir quelques rancoeurs acides chez certains, qui firent pourtant un morceau de chemin avec lui. Pour avoir été gérant d’un garage et tenu un restaurant, Mennucci sait que le moteur de la politique est souvent entraîné par des haines anciennes et que l’histoire repasse parfois les plats.
Carpita ne le verra pas
Il est parti en 2009. Paul Carpita fut sans doute le dernier des grands cinéastes communistes. Il a su, comme peu, immortaliser ce que l’on appelait naguère la classe ouvrière. Particulièrement le petit peuple de Marseille qui s’agitait sur les docks. Son film le plus important fut incontestablement « Le rendez-vous des quais ». Une belle histoire d’amour sur fond de guerre d’Indochine. Il ne fut visible, car censuré, sur le grand écran qu’en 1989, soit plus de trente ans après sa réalisation. Au-delà de la romance, Carpita y filme des hommes et des femmes de caractère, armés de leur seule espérance pour survivre et échapper à la misère à la force de leurs bras. Carpita était un militant convaincu. On imagine sa tristesse, aujourd’hui, devant la capitulation en rase campagne électorale des communistes marseillais. Il ont été repoussés d’un revers de main dédaigneux par celui à qui ils ont apporté leur aide et des voix à la Présidentielle. Pierre Dharréville, le secrétaire départemental a parlé lors d’une conférence de presse, de « sidération » « incompréhension » « gâchis », en constatant que la France Insoumise présentait des candidats contre le PC. Les lendemains qui chantent, ont été balayés par un présent qui déchante. Pourtant, avec un candidat appelé Coppola, le PC pouvait rêver d’une superproduction.
Ravier veut être entendu
Stéphane Ravier veut quitter le Luxembourg pour le Bourbon. Comprenez le palais du Sénat pour celui de l’Assemblée Nationale. Il devra du coup laisser sa place de maire dans son secteur, même s’il y a fort à penser qu’il trouvera, à la manière de Christian Estrosi à Nice, un suppléant qui ne lui fera pas de l’ombre. Ravier joue une partie tout à fait gagnable. Le FN est en terrain conquis depuis quelques années sur la 3ème circonscription. Christophe Masse qui a tenté d’obtenir le label de la République en Marche ne peut que se revendiquer « Majorité Présidentielle ». Richard Miron pour Les Républicains n’a pas non plus une dynamique favorable et la multiplicité des candidatures (17) donne un avantage à ceux dont la voix porte. Ravier est de ceux-là. Ce constat fait, quelle ambition au-delà de la députation poursuit Ravier ? A l’instar d’une Marion Maréchal Le Pen le Marseillais fait partie de la ligne dure du FN. Il n’est pas sûr qu’il ait une grande tendresse pour les frères Philippot, considérés au FN comme les fossoyeurs du second tour de la Présidentielle. S’il est élu, il faut s’attendre à ce qu’il revendique toute sa place dans l’organigramme du FN. On le verra plus souvent au siège national du FN qu’à Marseille. Si quelques-uns l’ont pris pour le Ravier de la crèche, ils devront en rabattre.
Arlette partie…
Elle avait tout à perdre. Elle le savait. Arlette Carlotti a jeté l’éponge prenant de court ses amis proches et ses supporters. Elle savait qu’on ne l’épargnerait pas dans cette campagne. On lui reprocherait son maroquin dans le gouvernement Valls. On raconterait que son anti-guérinisme a été bien tardif. On ressasserait le temps où elle passait à travers les gouttes, plutôt que d’affirmer un vrai positionnement dans le camp socialiste. Pourtant elle avait battu Renaud Muselier et ce n’était pas donné dans cette cinquième circonscription. Yves Moraine le maire du secteur doit-il pour autant se frotter les mains ? Ce serait imprudent, car dans ces quartiers en partie réputés bobos, la France en Marche revendique derrière son chef de file tout le pouvoir. Moraine s’affiche puissamment depuis des mois en revendiquant son appartenance à une majorité municipale, celle de Jean-Claude Gaudin. Mais l’air du temps est justement de contester, au nom d’un dégagisme brutal ou feutré, cette « histoire ancienne ». Si l’effet de souffle que prévoient certains instituts de sondage, préside aux élections législatives, il sera compliqué aux Républicains d’y résister. Si l’enracinement local surnage – malgré la présence dissidente de Maurice Di Nocéra, gaudiniste reconverti au macronisme – Moraine franchira l’obstacle. Avec dans sa mire la mairie de Marseille.
Les labours et les semailles…
Deux élus de droite Valérie Boyer, députée sortante de Marseille (1ère Circonscription) et Bruno Genzana, conseiller général d’Allauch, ont en commun une capacité d’occuper le terrain 24h sur 24. Associations, clubs, groupes divers, font partie de leur quotidien. Ils vont et viennent de goûter en assemblée générale, de manifestations sportives en réunions de quartiers, en gardant ce qui est remarquable une ligne impeccable. Mme Boyer est pourtant menacée dans sa circonscription, notamment par le représentant de la République en marche, Pascal Chamassian. L’ancienne porte-parole de François Fillon n’a pas hésité pourtant à reprendre à son compte une thématique chère au FN, s’inquiétant notamment de la présence inquiétante, pour elle, de dix réfugiés en formation à l’AFPA de la Treille. Il n’est pas certain qu’elle y ait gagné quoi que ce soit. Bruno Genzana affronte, lui, le député écologiste sortant François-Michel Lambert, qui porte les couleurs de la Majorité Présidentielle. L’ex-élu Aixois a en fait une grosse difficulté à résoudre. Il y a deux mois, on aurait joué sur Boyer et Genzana sans sourciller au Pasino d’Aix. Aujourd’hui beaucoup attendent la fin de la partie.