Vivant au milieu de lʼune des plus grandes zones industrielles dʼEurope, les habitants du golfe de Fos savent quʼils y respirent un air plus pollué quʼailleurs. Lʼétude Epseal, publiée en janvier 2017, mettait dʼailleurs en lumière le lien entre pollution atmosphérique et maladies respiratoires. Lundi soir, au centre culturel Marcel Pagnol de Fos-sur-Mer, lʼAssociation de défense et de protection du littoral du golfe de Fos (ADPLGF) tirait à nouveau la sonnette dʼalarme sur les conditions de vie des habitants de la région en présentant une nouvelle étude démontrant que les produits alimentaires étaient également touchés. De 2009 à 2015, des échantillons de produits appellation dʼorigine protégée (AOP) du pourtour du bassin de Fos ont été analysés par des laboratoires Coface (Carso à Lyon et Wessling à Saint-Quentin-Fallavier en Isère). Lʼassociation sʼest intéressée au taureau de Camargue, au mouton de la Crau, au fromage de chèvre des Alpilles, aux œufs de poules élevées en plein air, aux moules de Carteau à Port-Saint-Louis-du-Rhône, à lʼhuile d’olive, au foin de la Crau et aux poissons de Fos-sur-Mer.
Des dioxines dans la viande et dans les œufs
Lʼétude met en lumière des concentrations très élevées en dioxines, polluants organiques persistants considérés comme cancérogènes, dans la viande de taureau et les œufs. Sur les huit essais pratiqués sur les échantillons de viande bovine, deux valeurs dépassent le seuil réglementaire alors que, sur 318 essais analogues réalisés sur toute la France dans le cadre du plan de contrôle national, seul un dépassement a été enregistré. Lʼécart entre les deux résultats est encore plus grands pour les œufs car la moitié des prélèvements présente des dépassements dans la nouvelle étude contre 2 % au niveau national. Les fromages de chèvre et les moules sont également touchés par les dioxines avec des valeurs supérieures à à la moyenne nationale. Les analyses révèlent aussi une forte teneur en polychlorobiphényles (PCB) dans la viande, les œufs, les moules et les poissons. Enfin, les produits de la mer contiendraient également une grande quantité de métaux lourds comme le plomb et le cadmium.
Une plainte contre X pour mise en danger de la vie dʼautrui
Daniel Moutet, le président de lʼADPLGF, détient ces résultats depuis deux ans mais a préféré ne pas les rendre public pour ne pas léser les producteurs locaux qui sont considérés comme des victimes au même titre que la population. Depuis 2016, il a présenté ces analyses à lʼagence régionale de santé (ARS) et aux différents services de l’État « qui lʼont systématiquement ignoré », regrette René Raimondi, le maire de Fos-sur-Mer. Ce dernier soutient lʼaction de lʼassociation et demande aujourdʼhui lʼaugmentation des normes imposées aux industriels : « On ne prend pas en compte le cumul des usines. Individuellement, elles respectent les taux maximum mais à plusieurs, elles surpassent largement les normes », explique lʼélu. Lʼassociation a mandaté des avocats pour déposer une plainte contre X pour mise en danger de la vie dʼautrui au pénal et une autre pour troubles anormaux du voisinage devant le tribunal civil. Elle espère inciter les habitants à sʼassocier à ces actions en justice lorsquʼils sont concernés par les nuisances. Des formulaires ont été distribués aux personnes présentes à la réunion publique de lundi soir et souhaitant se pourvoir devant le tribunal de grande instance. LʼADPLFG promet de prendre en charge les éventuels frais dʼavocats.
Jean-Claude Gaudin relativise
Le président de la Métropole Aix Marseille Provence a évoqué, mardi 13 février, l’enquête sur les produits alimentaires du golfe de Fos lors du déjeuner de presse préparatoire au conseil de la Métropole. « Moi je sais pas, alors on va voir… Mais ceci n’est pas nouveau. Cela fait X fois que l’on nous fait le coup de soit disant l’enquête indépendante. Malgré tout la vie continue, l’activité continue et l’emploi continue autour de l’étang de Berre. Rappelez-vous tout ce que l’on nous disait sur l’incinérateur. Il est à 10 km de Fos-sur-Mer et à 5 kilomètres de Port-St-Louis du Rhône ! Et Dieu sait si on nous a emmerdés… »