Le monde tel qu’il va ! est le 1er temps fort organisé par l’association MJ1 dans les 4 000 m² de l’ancien hangar du port, redevenu galerie d’art pour une année. Une extension automnale des célèbres Rencontres internationales d’Arles à découvrir jusqu’au 7 janvier 2018. Direction le J1.
« Si vous ne venez pas à nous, nous venons à vous » : c’est en reprenant la célèbre phrase du Bossu de Paul Féval que Sam Stourzdé, directeur des Rencontres internationales de la photographie (RIP) d’Arles, a résumé la situation et s’est réjoui de « cette possibilité qui nous est offerte de partager cette exposition avec un public qui n’aurait pas eu la chance de venir jusqu’à Arles. 90 km nous sépare, tous n’ont pas franchi le pas. » Combien franchiront alors le quai de la Joliette pour pénétrer dans l’immense galerie avec vue sur mer qu’est redevenu pour l’occasion l’ancien hangar J1 ? Il faudra attendre le bilan de cette première manifestation de l’association MJ1, courant janvier 2018, pour le savoir mais déjà, comme Sandra Chalinet, vice-présidente de l’association, tous les partenaires en rêvent : « Les RIP ont eu une influence record cet été avec 125 000 visiteurs et on espère en avoir autant au J1. » remarque-t-elle. La gratuité de l’exposition sera sans conteste un atout supplémentaire.
Le monde tel qu’il va ! présente une vision du notre monde à travers une sélection de photographies exposées séparément cet été à Arles, et à laquelle s’est ajoutée celle portée par la photographe marseillaise Monique Derégibus sur l’île de Chypre. Plus exactement huit expositions en une (la thématisation n’existait pas à Arles), six cent vingt œuvres et trente-huit artistes. « On a décidé de réorganiser le programme des RIP à travers le regard que propose la photographie engagée et à travers ce nouveau titre Le Monde tel qu’il va !, précise Sam Stourzdé. C’est une plongée radicale au cœur d’une géopolitique complexe et bouillonnante. »
« Des désordres alimentaires aux désordres climatiques »
Elle a remporté un vif succès. L’enquête photographique de Mathieu Asselin sur Monsanto fait partie des expositions au J1. Le photographe d’origine aixoise invite le public à voyager dans l’univers de la multinationale, entre la maison du futur construite dans les années 50 à celles d’Anniston – une ville encore aujourd’hui contaminée en Alabama-, en passant par les photographies des victimes américaines et asiatiques de l’utilisation de l’agent orange sur plusieurs générations, les originaux de la publicité faite par Monsanto elle-même et l’exposition la fameuse graine
Autres regards, ceux de vingt-sept photographes et artistes colombiens sur leur pays avec La Vuelta. « Entre genres traditionnels et pratiques expérimentales, cette scène artistique très dynamique, explique Sam Stourzdé, témoigne aussi de leur pays et de la violence de la guerre vécue pendant six générations et d’autres thèmes conceptuels comme nature/culture ou identité/représentation. » Autre projet présenté ici : O Latina, programme de projections videos autour de l’Amérique du sud.
Philippe Dudouit a bâti son projet The Dynamics of Dust (La dynamique de la poussière) sur zones transfrontalières subsahariennes. Ancien paradis touristique désormais inaccessible aux étrangers, « il semble ne se passer pas grand chose dans ces paysages immenses et pourtant votre espérance de vie doit être limitée à une dizaine de minutes. »
C’est en Libye que Samuel Gratacap a déplacé son appareil photo et, à son arrivée, il a été troublé par la question que lui a posée son fixer (guide sur place) : « Vous êtes là pour les migrants ou pour la guerre ? ». Le photographe a décidé de ne pas choisir et de travailler à la fois sur la guerre et sur les migrants, sur cette zone de passage où on se remet à travailler pour gagner un peu d’argent pour payer son passage. Des migrants venus pour la plupart de la région subsaharienne d’ailleurs, ceux qui vivent le fity-fifty, la mort ou la vie, et la réalité du traffic, la situation chaotique du pays.
On poursuit ce tour du monde tel qu’il va par les travaux de Norman Behrendt sur l’extension d’Ankara et d’Istanbul et les nouvelles mosquées dans un style néo-ottoman. Côté architecture, Levitt France, une utopie pavillonnaire regroupe six photographes français autour d’une recherche de documentation sur le vaste projet de construction de quatre villages à l’américaine en Île-de-France, dans les années soixante-dix, par la société Levitt France et son fondateur américain William Levitt.
Intéressant également le travail de Gideon Mendel. Un Monde qui se noie explore la dimension humaine du changement climatique à travers une série de portraits intimes, submergés, ou des clichés abîmés par le passage de l’eau… dans treize pays visités.
Enfin, la photographe Monique Derégibus expose La maison Chypre, « cette île qui est un territoire divisée aujourd’hui en Europe », comme la définit l’artiste elle-même.
Entre espoir des uns et désespoir des autres, c’est ainsi que la monde va…
Informations pratiques
> Le Monde tel qu’il va ! – Les Rencontres d’Arles s’installent au J1 à Marseille
> Jusqu’au 7 janvier 2018
> Entrée libre
> vendredi, samedi, dimanche, de 10h à 18h (hors vacances scolaires) et du mardi au dimanche, de 10h à 18h pendant les vacances scolaires.À propos de l’association MJ1 :
Sandra Chalinet, vice-présidente et directrice des Terrasses du port : « C’est une grande fierté de faire découvrir pour la première fois à Marseille de faire découvrir les Rencontres d’Arles sur 4 000 m². Dans un deuxième temps, à partir de 2018, nous serons un des lieux d’expression de 2018 et nous sommes très fiers d’accueillir à nouveaux des photographes, de notoriété internationale : JR et Korakrit Arunanondchai (lire notre article précédent). Sur la dernière partie de 2018, puisque nous rendrons les clefs de ce magnifique lieu fin 2018, nous avons la volonté de construire un troisième temps fort autour de la métropole et nous sommes actuellement en pleine réflexion pour voir ce qui serait intéressant. Nous travaillons petit à petit mais sûrement, de façon constructive et dans un même objectif : l’attractivité, le rayonnement et la dynamisation de la métropole à travers le partenariat des deux neuf mécènes qui ont accepté l’aventure du J1. Les RIP ont eu une influence record cet été avec 125 000 visiteurs et on espère en avoir autant au J1. »À propos de RIP et Marseille :
Sam Stourzdé, directeur des Rencontres internationales de la photographie d’Arles : « Quand je suis arrivé aux RIP, on m’ a dit “tu verras avec Marseille, ce n’est pas évident”. Mais depuis, les liens se sont renoués. Il y a deux ans, on a initié le Grand Arles Express : c’est un peu de l’esprit d’Arles qui souffle dans les villes voisines, le temps du festival, qui souhaitent s’intégrer au programme. Ainsi, l’été dernier c’était à la Villa Méditerranée. Cet été, au FRAC. Mais on n’en attendait pas tant, de pouvoir investir avec le J1 une si extraordinaire friche. Nous qui sommes habitués aux friches, celle-ci est extraordinaire. Prolonger ainsi l’été arlésien, prolonger le succès de cette 47e édition, c’est formidable, car c’est toujours un crève cœur de voir remballer les expositions, même si on passe à la suivante. »