[pullquote]Des déplacements domicile-travail de plus en plus longs et onéreux[/pullquote]La mobilité est au cœur du développement. Nous nous déplaçons sans cesse entre lieux de résidence, lieux de travail, lieux de consommation, lieux de culture…passant sans nous en apercevoir d’une commune ou d’un département à un autre, mais en restant sur un même territoire: celui de notre cadre de vie. C’est ainsi qu’entre Marseille, Aubagne, Aix-en-Provence, Martigues, Istres ou Salon s’organise un vaste espace de communication autour d’un réseau routier et autoroutier performant, ponctué de petites villes et de grands ensembles, de zones d’activité et de lotissements seulement séparés par une agriculture péri-urbaine en danger de mort et de massifs mal protégés des «dégâts du progrès». Sur ce vaste territoire, les entreprises recherchent des opportunités d’installation et de développement. L’accessibilité, la fiscalité, l’environnement déterminent de plus en plus leur localisation. Elles se décident évidemment en fonction de leur intérêt propre. Les ménages pour leur part, dont le logement est conditionné par leurs ressources dans un contexte de rareté, sont contraints à des déplacements domicile-travail de plus en plus longs et onéreux.
Le territoire de la vie quotidienne s’élargit…
[pullquote]Ce territoire est en mouvement permanent. Les circulations se font dans tous les sens. Il est peu lisible.[/pullquote]Ce territoire de la vie quotidienne évolue avec la péri-urbanisation, la dynamique des entreprises, les installations de zones d’activité, les équipements commerciaux et culturels, le marché du travail. Il a plutôt tendance à s’élargir entre urbanité et ruralité mais il pourrait tout autant se réduire en cas de fermeture d’établissements, de difficultés de circulation ou de déprise économique. L’espace des Bouches-du-Rhône est un territoire d’intenses déplacements: quotidiens avec la dissociation croissante entre lieu d’habitat et lieu de travail, régulières entre lieu d’habitat et lieux de consommation et lieux culturels, fréquentes avec les flux touristiques; mais aussi très importantes en matière de transports de marchandises, d’approvisionnement des entreprises et des commerces, de transports internationaux entre Méditerranée, Espagne et Italie. Ce territoire est en mouvement permanent. Les circulations se font dans tous les sens. Il est peu lisible.
Mais le territoire du pouvoir local reste l’héritier de la Révolution française
Les limites des communes remontent au 14 décembre 1789. Elles n’ont pas varié depuis plus de deux siècles. Il n’y avait pas de problèmes lorsque leurs compétences étaient limitées à la proximité. Lorsque que les politiques économiques et sociales étaient conduites au niveau uniquement national, les communes s’attachaient à améliorer le cadre de vie de leurs habitants : voirie, école primaire, équipements culturels et sportifs, sécurité, logement, sans trop se soucier des actions conduites par leurs voisines, en fonction de leurs moyens et des aides régulières du Conseil Général ou Régional. Leur territoire était aménagé par l’Etat. Il n’y avait pas de conflit de compétences car l’économie et l’emploi leur échappaient, comme les questions sociales réglées par l’Etat -providence.
[pullquote]Mais l’esprit de la loi n’a pas été respecté[/pullquote]Mais à partir du moment où la décentralisation leur a accordé des pouvoirs économiques et d’aménagement, les communes ont dû faire face à leurs inégalités en terme de population et de ressources fiscales. Toutes n’avaient pas les moyens humains ou financiers de conduire des politiques économiques, d’emploi ou d’aménagement du territoire. Si les villes les plus grandes ont pu s’engager, les autres n’en avaient pas les moyens. La réforme de l’intercommunalité de 1999 a marqué une avancée. Contre toute attente sur un territoire où le dialogue est difficile, elle a réussi à regrouper des communes volontaires au sein de communautés plus vastes, ce qui ne veut pas dire toujours solidaires. Mais l’esprit de la loi n’a pas été respecté et ces regroupements ont été réalisés sur des bases politiques et financières et des dotations accordées par l’Etat. Ils n’ont pas pris en compte les aires urbaines, les déplacements domicile-travail, les zones d’emploi, les aires d’attraction commerciales, les bassins de vie ou d’habitat…bref, la vraie vie.
Entre temps, la mondialisation de l’économie a profondément et rapidement changé la donne. L’idée de politique économique locale s’est effacée devant l’ouverture au monde de toutes les entreprises, grandes ou petites, soumises à de nouvelles concurrences territoriales portant sur la fiscalité, l’offre de services, la qualité de l’environnement ou la gestion locale. Dés lors le défi à relever est devenu celui de la cohérence entre territoires politiques du pouvoir et territoires économiques du développement.
Retrouvez dimanche prochain le 2ème volet de la chronique de Philippe Langevin :
[Débat métropolitain] Osons la fraternité