En parallèle de l’exposition Mission Mode : styles croisés, Jean-Charles de Castelbajac a tenu, vendredi 21 octobre, une conférence à la bibliothèque de l’Alcazar sur, justement, l’influence du vêtement militaire dans ses collections. L’occasion pour Go Met’ de revenir sur cette double exposition proposée par le musée des arts décoratifs, de la faïence et de la mode de Marseille et le musée de la Légion étrangère d’Aubagne.
Issu d’une famille de militaire limougeaude, Jean-Charles de Castelbajac aspirait à devenir soldat mais, précise-t-il : « Après onze années passées dans un collège militaire, en pension, j’ai estimé que j’avais fait mon temps. Et en sortant de là, j’ai voulu tout l’inverse, la liberté. Comme du côté de ma mère, nous étions dans l’industrie textile, sur ses conseils, j’ai commencé à dessiner. Tout ce que je faisais venait, en fait, de la tenue militaire : le casque, le bouton sifflet… ».
Sa fascination, également pour les drapeaux qu’il collectionne, et son éducation familiale influenceront les dix premières années de son travail : du beige, du kaki, des matériaux détournés, comme la soie des parachutes et des techniques oubliées. « Quand j’ai vu comment les soldats de 14-18 portaient leur couverture roulée en biais, mon premier détournement a été de faire renaître ma couverture de pensionnaire : en haut ou en bonnet ». Ce bonnet roulé qui sera largement copié par la suite. Suivront des collections étonnantes et fun à souhait. Un style qui a marqué les mémoires. Jusqu’aux tenues de Farrah Fawcett dans Drôles de dames « retravaillées en XXS, elles n’avaient plus rien de leur origine fonctionnelle ».
Des Sex Pistols à Jean-Paul II, de Lady Gaga à Yannick Noah, Jean-Charles de Castelbajac qui se définit lui-même comme « un anti-mode mais un pro-style », a habillé des personnalités bien différentes et aime à se rappeler cette phrase qui lui a dite un jour le président François Mitterrand : « La mode est un des plus jolis instruments de la démocratie ».
Quand le militaire inspire les créateurs
C’est à travers cette double exposition, entre le musée des arts décoratifs, de la faïence et de la mode de Marseille et le musée de la Légion étrangère d’Aubagne que le visiteur pourra saisir à quel point le vêtement militaire a joué de son influence dans la garde-robe civile. Deux univers pas si contradictoires alors. Si le premier est fondamentalement essentiel, la seconde a aimé le copier, le détourner, le magnifier ou lui emprunter ses épaulettes, ses galons, ses martingales, ses boutons et surtout sa couleur kaki et ses imprimés camouflage.
Tel un régiment, les mannequins semblent défiler dans les salons d’apparat du château Borély. Une scénographie parfaite qui interpelle le visiteur, notamment, lorsqu’il pénètre dans la chambre aux superbes tentures murales « indiennes », à la recherche de l’homme des neiges. Des camouflages réels étonnants ou irréels, comme cet ensemble pantalon doré signé Chanel dans le grand salon… Près d’une quarantaine de silhouettes sont ainsi dispersées dans le château, sans oublier les accessoires griffés Vuitton, Hermès, Bensimon…, pour illustrer, comme le souligne la conservatrice Christine Germain, « l’incroyable source d’inspiration que représente le vestiaire militaire sur la mode civile depuis plus d’un siècle ». Quant à la saharienne, une salle lui est consacrée : de son apparition dans les années 30 à sa première présence sur le défilé d’Yves Saint-Laurent, en 1967, en passant par son rôle dans le cinéma américain des années 50.
Et pour découvrir plus de tenues militaires, direction Aubagne et le musée de la Légion étrangère, unique en son genre et labellisé musée de France depuis 2011. Là prennent place sur des podiums une trentaine de pièces, de 1831 aux années 60. Tenues coloniales, de combat, de sortie, vareuses, képis… mais aussi tenues de gala qui illustrent ce sentiment intemporel du « prestige de l’uniforme ». Et au capitaine Géraud Seznec, conservateur du musée, d’expliquer que « les technologies font évoluer le vêtement militaire. On a abandonné, par exemple, les vêtements cintrés pour des tenues plus amples et donc moins détectables par les lunettes à infra rouges pour la vision nocturne ».
Inédite, Mission Mode : styles croisés est une exposition à découvrir sans faute.
PRATIQUE :
Exposition Mission Mode : styles croisés jusqu’au 15 janvier 2017.> Musée des arts décoratifs, de la faïence et de la mode – Château Borély – 13008 Marseille
Tarifs : 3 € et 5 € + tarifs selon animations
Visites commentées les dimanches à 15h
Visite en famille, mercredi 23 octobre à 14h, sur réservation.
Visite contée en famille les jeudis 27 octobre et 22 décembre à 10h30, sur réservation.> Musée de la Légion étrangère – Chemin de la Thullière – 13400 Aubagne
Visite commentée gratuite le mercredi à 15h
> http://www.mission-mode.fr
(Photo Une : J-Ch de Castelbajac entouré de l’adjudant R. Nyrdle et du capitaine G. Seznec, conservateur du musée de la Légion étrangère © DV)